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Sud-Ouest

Désherbage des céréales à paille : choisir les leviers adaptés au contexte

Bientôt les semis de céréales… il faut établir dès maintenant ses stratégies de désherbage, afin d’optimiser la lutte contre les adventices en végétation.

Herse étrille dans une parcelle de blé tendre dans le sud-ouest

L’an dernier, très peu de faux-semis ont pu être réalisés en raison des conditions sèches de fin d’été / début d’automne. Le stock semencier n’avait pas pu être réduit à ce moment-là mais le désherbage s’était ensuite plutôt bien réalisé dans les campagnes, avec des conditions météo favorables. Des parcelles restent néanmoins très infestées en ray-grass et vulpins, avec des cas de résistances.

Cette année, des faux-semis ont pu être menés dans certains secteurs, avec des pluies aux répartitions inégales : à Auch (32), 83 mm enregistrés entre le 11 et 17 septembre ; à Gimont (32), 44 mm le 12 et 15 septembre ; à Montans (81), 38 mm du 11 au 17 septembre ; et largement moins à En Crambade (31), 5 mm le 12 septembre et 3 mm le 21 septembre, ce qui est également le cas sur l’est de l’Aude (entre 8 et 15 mm mi-septembre). C’est à présent le moment d’anticiper et planifier les différents leviers à mettre en place dans les parcelles.

Les leviers adaptés en fonction des adventices présentes dans la parcelle

Le risque de salissement des parcelles semées tôt reste important avec le risque associé de développement rapide des adventices. La stratégie de désherbage est donc à anticiper au plus tôt, et cela passe tout d’abord par une bonne connaissance de l’état de salissement de la parcelle et des adventices présentes.  A chaque adventice, son cycle de développement spécifique : profondeur optimale de germination, période préférentielle de germination, type de reproduction, taux annuel de décroissance (TAD). Chacun de ces éléments déterminera les leviers à mettre en place pour être le plus efficient possible.

Tableau 1 : Efficacité de différents leviers sur les adventices
Tableau 1 : Efficacité de différents leviers sur les adventices

Sources : Note commune GISHPEE 2018, infloweb.fr

Parcelles fortement infestées : retarder les dates de semis

Les essais menés chez ARVALIS au cours des campagnes 2016-2020 sur blé et orge d’hiver ont montré que le décalage de la date de semis, même réduit, a toujours un effet positif sur le niveau de graminées adventices levées dans la culture (figure 1).

Figure 1 : Effet de la date de semis sur le nombre d'adventices (ray-grass ou vulpins) dans les céréales à paille
Figure 1 : Effet de la date de semis sur le nombre d'adventices (ray-grass ou vulpins) dans les céréales à paille

Source : ARVALIS

L’écart entre deux dates de semis est exprimé en somme de degrés/jour (200°C correspond à une quinzaine de jours à cette période de l’année, par exemple entre le 20 octobre et le 3 novembre).

Au-delà d’un décalage de la date de semis de 15 jours, il faut bien évaluer le bénéfice par rapport aux risques (jours disponibles, conditions d’implantations potentiellement plus difficiles, perte de potentiel…). On réservera donc ce levier efficace pour les parcelles les plus sales.

Pour rappel, en plus du désherbage, ce levier permet également de réduire le risque d’infestation par les pucerons, et donc la transmission possible du virus de la JNO (Jaunisse Nanisante de l’Orge).

Désherbage mécanique en complément

Le passage de herse étrille, houe rotative ou encore de bineuse, peut s’envisager en complément de la lutte chimique sur céréales. Le choix de l’outil est à réfléchir en fonction du type de sol. Il sera également conseillé d’anticiper l’éventuelle perte de pieds en adaptant la densité de semis et la profondeur. Les systèmes d’autoguidage permettent aujourd’hui une précision intéressante pour le binage à écartement « standard » à condition de s’assurer de quelques éléments : une bonne équidistance entre chaque rang du semoir, l’alignement à chaque entrée de passage lors du semis, l’absence de jeu dans les chandelles d’attelage du tracteur et une précision du système de guidage.

Le labour quant à lui, est un moyen de lutte à ne pas écarter. Ce levier montre encore son efficacité sur la réduction du stock semencier, notamment en cas d’échec de désherbage des cultures précédentes. Il représente un investissement important (temps de travail et coût de passage) mais lorsqu’il est pratiqué occasionnellement, il reste très efficace sur les adventices dont le TAD est très élevé. C’est le cas par exemple des graminées (figure 2), dont le taux de « mortalité » des semences va croître très rapidement dès la première année d’enfouissement.

Figure 2 : TAD par type d’adventices et effet du labour
Figure 2 : TAD par type d’adventices et effet du labour

La lutte chimique : quel programme réaliser à l’automne ?

En cas de faible infestation de graminées (moins de 5 adventices/m²), un herbicide à l’automne suivi d’un passage sortie hiver ou l’un ou l’autre peut suffire dans les situations les moins complexes (rotations longues, faible pression, absence de risque résistance…).

En cas de forte pression, les parcelles à problème doivent bénéficier d’un travail du sol adapté et ne devront pas être semées avant fin octobre à début novembre. Le désherbage est d’ores et déjà à anticiper. Un travail du sol fin et répété peut encore faire lever les graminées, voire aussi perturber les limaces. Le désherbage chimique doit rester le dernier levier à activer. Il sera en revanche indispensable d’intervenir à l’automne, en prélevée ou postlevée précoce (2 feuilles à 1 talle), voire les deux en cas de résistance et/ou de forte infestation. Dans ces situations, il est illusoire de ne compter que sur la lutte chimique.

Retrouvez des préconisations de programmes herbicides
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Tableau 2 : Conditions d'application optimales des herbicides
Tableau 2 : Conditions d'application optimales des herbicides

Prosulfocarbe : de nouvelles règles d’application en vigueur au 1er novembre 2023

L’ANSES a rendu ses décisions le mardi 3 octobre 2023 après son évaluation des risques liés à l’utilisation du prosulfocarbe.

Ce qu’il faut retenir pour les céréales à paille :

  • Réduction de 40 % des doses : les anciennes doses homologuées à 5 l/ha passent à 3 l/ha.
  • Le stade d’application limite est revu à la baisse : interdiction de traiter au-delà de BBCH 13 (3 feuilles).
  • Une DSRPP à 20 m en cas d’utilisation de buse homologuées à 66 % ou 75 %, et de 10 m avec l’utilisation de buses à 90 %.
  • Rappel : utilisation obligatoire de dispositifs antidérive homologués + DSRPP à 20 m réductible sous conditions, des règles sont à respecter pour les parcelles de céréales jouxtant certaines cultures non-cibles.
  • Cultures non-cibles situées à moins de 500 m de la parcelle à désherber : ne pas appliquer le produit avant la récolte de ces cultures.
  • Cultures non-cibles situées à plus de 500 m et à moins de 1 km de la parcelle à  : ne pas appliquer le produit avant la récolte de ces cultures ou, en cas d’impossibilité, appliquer le produit uniquement le matin avant 9 heures ou le soir après 18 heures, en conditions de température faible et d’hygrométrie élevée.

L’OAD « Quali’cible » développé par Syngenta permet d’aider à la localisation des parcelles à risque.

En agriculture biologique : la lutte préventive avant tout

En agriculture biologique, la gestion des adventices ne se restreint pas au désherbage mécanique mais passe par la mise en place de nombreux leviers agronomiques visant à perturber le cycle des adventices. Cette stratégie se raisonne à la parcelle et commence par la connaissance des espèces d’adventices, de leur biologie ainsi que du niveau d’infestation.

La réussite du désherbage réside en premier lieu dans la destruction de toutes levées avant l’implantation de la culture à semer. Les adventices développées le jour du semis seraient très compétitives vis-à-vis de la culture et limiteraient dès le démarrage l’efficacité des passages mécaniques ultérieurs.

Les outils les plus utilisés aujourd’hui sont la herse étrille, la houe rotative, la roto étrille ou encore la bineuse, qui, avec l’autoguidage, est devenue incontournable. L’efficacité de l’outil dépend du type de sol, de l’espèce et du stade de l’adventice, ainsi que du climat. On visera un créneau d’intervention sur un sol ressuyé mais pas trop sec, non gelé, et avec une prévision de pluie nulle ou très faible le jour de l’intervention et lors des trois-quatre jours suivants.

Les adventices les plus difficiles à gérer restes les vivaces (chardon, rumex) ainsi que la folle avoine.

Tableau 3 : Des efficacités dépendantes de la nature des adventices
Tableau 3 : Des efficacités dépendantes de la nature des adventices

Source : Note commune GISHPEE 2018.fr 

Tableau 4 : Des efficacités dépendantes des stades des adventices
Tableau 4 : Des efficacités dépendantes des stades des adventices

Source : Note commune GISHPEE 2018.fr 

Figure 3 : Stades de passage optimaux pour le désherbage mécanique sur céréales à paille d’hiver 
Figure 3 : Stades de passage optimaux pour le désherbage mécanique sur céréales à paille d’hiver 

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