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MEDITERRANÉE

Blé dur 2022 : retour sur une campagne au climat particulièrement sec

La période de janvier à juin 2022 est la plus sèche depuis ces 20 dernières années, avec des déficits moyens de 50 % à Nîmes et Gréoux-les-Bains, 30 % à Orange, 25 % à Arles... Ces conditions ont notamment rendu très difficile la valorisation des apports d'azote. Les rendements en blé dur sont à la baisse par rapport à la moyenne décennale mais la qualité reste correcte.

Blé dur : les faits marquants de la campagne 2021/22 en Méditerranée

La campagne 2021/22 a connu plusieurs grandes séquences climatiques.

Elle a d’abord démarré par de fortes pluies en septembre et début octobre : une succession d’épisodes méditerranéens a touché la partie Est-Hérault, le Gard et la Vallée du Rhône (120 mm). La Camargue et les Alpes de Haute-Provence ont reçu également de bonnes précipitations à cette période-là, mais moins extrêmes en quantité (60-70 mm). Ces conditions ont permis de préparer les sols et la majorité des semis ont été réalisés de mi- à fin octobre.

A l’inverse, sur la partie Est-Audoise et Ouest-Hérault (de Narbonne à Béziers), il n’y a eu aucune précipitation, ce qui a repoussé les semis au mois de novembre.

Par la suite, novembre et décembre ont connu des pluies régulières mais en moindre quantité par rapport à d’habitude, les épisodes méditerranéens ayant eu lieu début octobre.

Un hiver froid avec de fortes amplitudes thermiques

Janvier et février ont (enfin !) enregistré des températures négatives le matin, ce qui a mis un coup de frein au développement des blés.

De grosses amplitudes thermiques ont marqué la sortie d’hiver, avec des températures négatives le matin pouvant remonter jusqu’à 20°C la journée. Les Alpes de Haute-Provence et le Pays Aixois ont particulièrement été concernés avec des températures descendant jusqu’à -10°C durant la nuit.

Ces conditions ont perturbé les opérations de désherbage de sortie d’hiver, expliquant un salissement des parcelles en ray-grass, mais surtout en dicotylédones (coquelicot, véronique et fumeterre entre autres). Le positionnement des hormones a notamment été complexe.

Une sécheresse qui s’est installée dès le mois de janvier

Côté pluies, elles ont été totalement absentes en janvier, de Béziers jusqu’à Manosque. La première pluie a lieu les 13 et 14 février, mais en quantité hétérogène selon les secteurs : 3 mm à Béziers, 30 mm à Nîmes, 17 mm à Orange, 12 mm à Arles et à Gréoux-les-Bains.

Mi-mars, un épisode méditerranéen touche la partie Est-Audoise et Ouest-Hérault avec des cumuls de plus de 200 mm, provoquant des inondations. Cette pluie, très localisée, se retrouve en moindre quantité sur le Gard (40 mm) et disparaît quasiment sur la Camargue, la Vallée du Rhône et les Alpes de Haute-Provence (0 à 12 mm). Il faut attendre plus d’un mois pour retrouver la pluie : fin avril, une pluie touche toute la région mais encore une fois de manière hétérogène : de 15 à 40 mm selon les secteurs. Les Bouches-du-Rhône, le Vaucluse et les Alpes de Haute-Provence cumulent difficilement 60 mm depuis début janvier.

Tableau 1 : Précipitations cumulées par période sur la campagne 2021/22 – station météo de Nîmes (30)
Précipitations cumulées par période sur la campagne 2021/22 – station météo de Nîmes (30)

Une valorisation des apports d’azote très compliquée en l’absence de pluie

Dans ces conditions, difficile de valoriser les apports d’azote.

L’essai fertilisation mené à Fourques (30) en témoigne : il n’y a aucune différence de rendement entre modalités (figure 1), contrairement aux dernières années.

Ces modalités se différencient par l’apport montaison qui est plus ou moins important avec un écart allant jusqu’à 160 kg N/ha entre les deux extrêmes. Il n’y a eu aucune pluie le mois suivant cet apport.

Malgré les stress hydrique et azoté, aucune régression de talles n’a été observée.

Le froid et l’arrivée précoce du sec semblent avoir stoppé/ralenti le développement des cultures, ce qui a limité leurs besoins en eau et en azote en janvier/février et sûrement favorisé leur enracinement.

Concernant le dernier apport, positionné le même jour et à la même dose, il a été valorisé dans les secteurs où il a plu le 20 avril.

Sur l’essai, le taux de protéines augmente progressivement entre la modalité la moins fertilisée et la plus fertilisée, mais il n’y a pas de différence de rendement (donc pas plus de dilution entre modalités). Cela suggère que l’azote de l’apport précédent qui avait été non valorisé courant montaison l’a été en partie à fin montaison.

Figure 1 : Rendement du blé dur (en q/ha) selon différents modalités d’apports d’azote – essai de Fourques (30) en 2021/22
Rendement du blé dur (en q/ha) selon différents modalités d’apports d’azote – essai de Fourques (30) en 2021/22

Une fin de cycle très chaude et sèche

A partir de début mai, des températures échaudantes sont mesurées partout. Au total, Nîmes a enregistré 41 jours avec des températures supérieures à 25°C entre la floraison (17 avril) et la moisson (17 juin). Ces températures sont couplées à une sécheresse intense jusqu’à la moisson.

Une dernière pluie en mai (le 8) arrose les Alpes de Haute-Provence (50 mm) et le Gard (20 mm) mais ne touche pas les autres secteurs.

Il ne pleuvra plus jusqu’à la moisson.

Finalement, la période de janvier à juin sera la période la plus sèche depuis ces 20 dernières années, avec des déficits moyens de 50 % à Nîmes et Gréoux-les-Bains, 30 % à Orange, 25 % à Arles. Seule la partie Biterroise se retrouve avec une pluviométrie plus élevée que la moyenne (+ 4 %).

Le remplissage des grains s’est donc fait en conditions sèches et chaudes. L’impact de ces deux facteurs combinés a été important : le poids de mille grains est en net retrait cette année (-20 % dans les essais ARVALIS). Le poids spécifique est également impacté, allant de 72 à 80 kg/hl pour une moyenne autour de 78 kg/hl pour la région. La teneur en protéines et faible à moyenne : de 12 à 13 %.

A noter qu’on ne relève pas de mycotoxines dans l’ensemble de la région et peu de grains mouchetés (ponctuellement sur quelques secteurs).

Comme chaque année, le constat est le même : sur les parcelles superficielles les plus en stress hydrique, l’échaudage a été plus marqué que sur les parcelles plus profondes.

Pour en savoir plus sur les résultats par secteur, téléchargez le bulletin ABDD n°12.

Des rendements globalement à la baisse par rapport à la moyenne décennale

Dans l’Est-Audois, les rendements sont bons (35 q/ha en moyenne), la qualité est moyenne, avec des PS autour de 76-77 kg/hl et des lots mitadinés.

Dans l’Hérault, le rendement moyen est dans la moyenne des 10 dernières années, avec de l’hétérogénéité entre les terres plus profondes et les terres les plus séchantes (comme partout dans la région). Les PS sont parfois faibles : 72 à 75 kg/hl sur les terres les plus séchantes, globalement 78-79 kg/hl. Les taux de protéines sont faibles, de 11 à 13 %.

Dans le Gard, de grosses hétérogénéités géographiques sont également présentes. Sur le Nord Gard, le rendement semble dans la moyenne (40 q/ha). Le PS est en moyenne de 78 kg/hl, les taux de protéines sont faibles, de 11 à 12 %.

Dans la partie Camarguaise, les rendements sont hétérogènes : bons dans le Sud Gard et l’Ouest Bouches-du-Rhône, et mauvais dans les terres sableuses. Ailleurs, pour des semis classiques, les rendements ont été préservés malgré la sécheresse, en partie grâce à la remontée de la nappe après la mise en eau des riz. Sur ces parcelles, le taux de protéines est cependant souvent un peu faible (12 % en moyenne). Le rendement moyen est d’environ 50 quintaux sur ce secteur. Niveau qualité, les PS tournent autour de 78-80 kg/hl. Des problèmes de mitadinage sont signalés : 20 à 30 % de la collecte.

En Vallée du Rhône, les rendements sont dans la moyenne basse (-5 à -10 %). Sur les terres non irriguées, les rendements sont en chute de 20 à 25 % par rapport aux autres années. Sur les parcelles irriguées (4 irrigations), les rendements sont dans la moyenne et ont atteint 80 quintaux. Les PS sont un peu faibles (77-78 kg/hl). Les taux de protéines sont globalement moyens à faibles, 12 % en moyenne. Sur les parcelles avec des gros rendements, il y a eu des taux de protéines faibles.

Dans la Drôme, les rendements sont corrects en irrigué, mais faibles en non irrigué. La qualité est au rendez-vous : les taux de protéines sont corrects même en situations à forts rendement.

Dans le Lubéron, les rendements sont fortement impactés : -40 à -50 %. La moyenne est autour de 20 quintaux. Les PS sont en moyenne de 75-76 kg/hl. Les taux de protéines sont plus élevés qu’ailleurs.

Dans les Alpes de Haute-Provence et le Pays Aixois, le rendement moyen est en baisse de 30 à 50 % en l’absence d’irrigation, avec des taux de protéines autour de 16-17 % et des PS souvent impactés (76-77 kg/hl). En présence d’irrigation (précoce et soutenue : 4 à 5 arrosages de 30 mm), les potentiels de rendement sont maintenus à des niveaux autour de 70-80 q/ha, avec des PS autour de 78 kg/hl.

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