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Sud-Ouest

Décaler son semis de céréales : oui ! Retarder son désherbage : non !

Le décalage de la date de semis est l’un des leviers agronomiques efficaces pour lutter contre les infestations en graminées de ses parcelles. Il contribue également à gérer les risques maladies et ravageurs d’automne (pucerons et cicadelles).

Désherbage mécanique sur une parcelle de blé tendre en 2025 en Occitanie

Une des principales raisons pour lesquelles il est préconisé de semer plus tardivement, est le risque de salissement des parcelles. En effet, les résultats d’essais d’ARVALIS ne cessent de le démontrer. Les graminées lèvent massivement à l’automne (figure 1) et par conséquent, un semis trop précoce expose davantage les cultures aux levées durant leur cycle. Ainsi, en semant sur la dernière semaine d’octobre ou début novembre, on réduit le nombre de ray-grass/m2 d’au moins 52 % en comparaison à un semis début octobre (figures 2 et 3).

Figure 1 : Levée des vulpins (pl/m2) - 10 suivis - Automne 2022 à 2025

Figure 1 : Levée des vulpins (pl/m2) - 10 suivis - Automne 2022 à 2025

Figure 2 : Proportion (%) de levées des ray-grass en fonction de la date de semis – essai ARVALIS de Mespuits (91) – Automne 2015-2017 sur sol argilo-calcaire moyen (2016, 2017)

Figure 2 : Proportion (%) de levées des ray-grass en fonction de la date de semis – essai ARVALIS de Mespuits (91) – automne 2015-2017 sur sol argilo-calcaire moyen (2016, 2017)

Figure 3 : Nombre de ray-grass/m2 et pourcentage d’efficacité en fonction de la date de semis - Essai ARVALIS de Montesquieu Lauragais (31) sur sol argilo-calcaire - (Essai combinaison de leviers, 2022)

Figure 3 : Nombre de ray-grass/m2 et pourcentage d’efficacité en fonction de la date de semis - Essai ARVALIS de Montesquieu Lauragais (31) sur sol argilo-calcaire - (Essai combinaison de leviers, 2022)

Organiser les chantiers de « semis + désherbage »

La réussite de la culture passe avant tout par une bonne connaissance du parcellaire. Les chantiers de semis doivent se raisonner au cas par cas selon le type de sol, l’exposition mais aussi par le stock grainier (adventices). En cas d’implantations précoces, éviter au maximum de semer les parcelles sales en premier, et où la gestion des adventices est problématique. Cela ne fera qu’empirer la situation.

Eviter également de raisonner « d’abord semer toutes les parcelles, et désherber plus tard si la météo le permet toujours » et préférer « semer, désherber, et de préférence, en priorité de semis, les parcelles les plus propres ».

Donner priorité à la prélevée

Les essais désherbage menés par ARVALIS ont montré depuis plusieurs campagnes, qu’en année moyenne, et à produit et dose égale, qu’un traitement en prélevée montrait une efficacité moyenne supérieure de 10-15 % par rapport à un traitement en post-précoce (1F).

Pour être pleinement efficace, le positionnement du traitement de prélevée est crucial : sur un sol humide et portant, les conditions de semis doivent être idéales (graines recouvertes), et un cumul de 10 mm de pluie dans les quinze jours. Même si ces conditions ne semblent pas réunies, si la pression graminées est forte dans la parcelle, il conviendra tout de même de réaliser l’opération en essayant de la positionner au plus près du semis.

Figure 4 : Efficacité de programme herbicides selon le positionnement – 2 essais 2024/2025

Figure 4 : Efficacité de programme herbicides selon le positionnement – 2 essais 2024/2025

Figure 5 : Efficacité de programme herbicides selon le positionnement – 4 essais 2022 à 2024

Figure 5 : Efficacité de programme herbicides selon le positionnement – 4 essais 2022 à 2024

En cas de forte infestation et notamment si présence de résistances aux groupes HRAC 1 et 2 (FOP, DEN, sulfonylurées), il est préconisé une double application à l’automne : pré + post précoce, afin de contenir tôt et de manière robuste le risque de salissement de la parcelle.

Les herbicides de prélevée agissent majoritairement par absorption racinaire lors de la germination de l’adventice. La réussite d’un désherbage de prélevée repose sur deux éléments essentiels :

  • Le premier est lié à la qualité du semis : l’implantation des semences doit être à une profondeur suffisante (3 cm) et régulière afin de limiter le contact de l’herbicide avec le blé, sinon les phénomènes de phytotoxicité pourront être exacerbés.   
  • Le deuxième dépend des conditions d’humidité du sol au moment du passage, la teneur en eau du sol est déterminante sur l’efficacité du produit, des conditions sèches au semis et au moment de la prélevée vont grandement altérer l’efficacité de l’herbicide : mieux vaut décaler le semis et l’intervention sur des créneaux plus favorables.

Quelques propositions de programmes chimiques sur ray-grass

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Tableau 1 : Propositions de programmes tout automne en blé tendre, correspondant à des situations de graminées résistantes

Tableau 2 : Propositions de programmes tout automne en blé dur, correspondant à des situations de graminées résistantes

Tableau 3 : Propositions de programmes tout automne en orges, correspondant à des situations de graminées résistantes

Opter avant tout pour une gestion pluriperformante du désherbage

Une stratégie désherbage performante doit s’appuyer sur les solutions agronomiques ou mécaniques complémentaires à la lutte chimique. Parmi les plus efficaces, le décalage de la date de semis, le labour occasionnel, l’allongement et la diversification de la rotation (ajout de cultures de printemps notamment), le nettoyage assidu de la moissonneuse-batteuse.

Plusieurs d’entre eux sont applicables à l’automne.

Le décalage de la date de semis

Comme cité précédemment, plus que le faux-semis, l’effet du décalage de la date de semis est, dans notre région, l’un des leviers les plus efficaces pour réduire l’enherbement dans la céréale implantée. De nombreux essais pluriannuels (Syppre, essais longue durée (31)) ont permis de montrer qu’un passage d’une date de semis au 20 octobre à une date de semis au 5 novembre permet de réduire de 50 à 70 % les infestations de ray-grass, et augmente globalement l’efficacité des traitements phytosanitaires.

Le semis sur sol propre

C’est indispensable à la bonne réussite du désherbage. Il faut notamment être vigilant à bien détruire les ray-grass tallés (soit mécaniquement, soit chimiquement).

La non-perturbation du sol au semis

Une récente synthèse de 58 essais entre 2007 et 2023 sur les faux-semis, ont mis en évidence plusieurs éléments clés sur le salissement des parcelles en lien avec les interventions du travail du sol avant et pendant le semis des céréales. La réalisation d’un ou plusieurs faux-semis permettraient de faire doubler les levées d’adventices dans l’interculture, et donc d’agir sur la diminution du stock grainier du sol. On remarque cependant que la mise en place d’un ou plusieurs faux-semis n’aurait pas d’impact sur la diminution des levées dans la culture suivante. Autrement dit les faux-semis n’auraient pas d’effet « court terme » sur la gestion de l’enherbement de la culture implantée en suivant ; certainement sur le plus long terme mais il n y’a actuellement aucun élément confirmé à ce jour. Ce qui a été démontré, en revanche, c’est l’impact de la perturbation du sol au semis. Ainsi, on observe que les levées d’adventices dans la culture semée sans perturbation du sol (semis direct) seraient significativement inférieures à celles dans une culture semée en combiné (semis avec perturbation du sol) (figure 6).

L’effet de la non-perturbation du sol sur les relevées d’adventices dans la culture suivante serait donc bien plus important que l’effet du faux-semis en lui-même.

Figure 6 : Suivi des plantes levées dans les cultures suivantes

Figure 6 : Suivi des plantes levées dans les cultures suivantes

Les désherbages mécaniques

La herse étrille, comme la houe rotative, est efficace sur des adventices très jeunes (stade filament blanc à 2 feuilles) ; il est donc important d’intervenir tôt. Avec ces outils, des passages précoces dès l’automne sont possibles, soit avant la levée de la céréale, soit du stade 3 feuille à début tallage. En parallèle, l’opération, à réaliser sur un sol suffisamment ressuyé, doit être suivie de deux à quatre jours séchants afin que les adventices arrachées ne redémarrent pas.

Dans un contexte d’efficacité non optimale de la prélevée, le passage d’une herse étrille à l’aveugle peut, dans certaines conditions, permettre de gagner en efficacité dans la gestion du désherbage.

Tous les résultats des essais dans le guide régional Choisir & Décider spécial désherbage des céréales à paille.

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