Articles et actus techniques

Quelle stratégie adopter pour protéger le maïs contre les attaques de géomyze ?

Dans les secteurs historiquement concernés par des attaques de géomyze, il est prudent d’envisager une protection des prochains semis de maïs. Avec quelles solutions ? Pour quelles efficacités Eléments de réponse avec les derniers résultats d’essais et la réglementation en vigueur.

dégât caractéristique de géomyze

L’intensité des attaques de géomyze sur maïs varie très fortement selon les années. Cette variabilité s’explique en grande partie par les conditions climatiques rencontrées au cours de l’année qui précède le semis et jusqu’à la fin de la période de sensibilité de la culture de maïs.

Lire aussi : « Géomyze sur maïs : des attaques d’une rare intensité sur les premiers semis 2023 »

Les conditions de l’été 2023 ont été favorables pour avoir une population abondante de géomyze à l’entrée de l’hiver. Les températures moyennes rencontrées au cours de l’hiver 2023-2024 ont été particulièrement favorables à la survie hivernale des individus. Par conséquent, les conditions météo rencontrées jusqu’à fin février sont favorables à une forte abondance de géomyze au cours du printemps 2024. Le risque estimé pour 2024 peut donc être considéré comme élevé. A titre de comparaison, il est du même niveau que le risque prédit pour le printemps 2016, au cours duquel les attaques de géomyzes avaient atteint une ampleur exceptionnelle.

Les conditions climatiques au cours du printemps 2024, et en particulier autour des stades de sensibilité du maïs (depuis la levée jusqu’au stade 4-5 feuilles) seront déterminantes sur l’exposition du maïs aux géomyzes.

A défaut de pouvoir prédire plus précisément le risque, il est prudent d’envisager de réaliser une protection insecticide des prochains semis dans les secteurs qui sont régulièrement concernés par ce ravageur.

Lumiposa : une nouvelle dérogation pour 2024

Pour faire face au risque de dégâts de géomyze sur maïs dans l’ouest de la France, l’AGPM a à nouveau demander une dérogation pour disposer de la solution Lumiposa (à base de cyantraniliprole) en 2024. Une autorisation de mise sur le marché a été accordée pour la période du 1er mars au 29 juin 2024 pour la protection des semis de maïs grain et de maïs fourrage selon les dispositions suivantes :

  • Semis autorisé uniquement en régions Bretagne, ex Basse Normandie (Calvados, Manche, Orne) et Pays de la Loire.
  • Traitement de semences réalisé en usine.
  • Ne pas semer sur sol drainé artificiellement.
  • Ne pas semer sur des parcelles présentes dans les périmètres de protection des captages d’eau potable en eau souterraine. En absence de délimitation de périmètres de protection rapproché ou éloigné, la zone de protection est élargie à la commune où se situe le captage.
  • A la dose maximale de 52,3 grammes par hectare, contre 67,5 g/ha pour la dérogation accordée pour 2023. 52,3 g/ha correspond à une dose de 0,475 mg par grain pour un semis à 110 000 grains par hectare (densité de semis préconisée en Bretagne), ou à 0,614 mg/gr pour 85 000 gr/ha.

Une réduction de dose qui se voit sur l’efficacité

Les essais réalisés par Vert-Marine pour ARVALIS à Ploudalmézeau (29) en 2023 ont subi des attaques très intenses de géomyze, avec 92 % de plantes attaquées au stade 3 feuilles dans les témoins non protégés. Dans ces conditions d’attaques assez exceptionnelles, la solution Lumiposa a obtenu une efficacité de 61 à 68 % selon la dose de produit appliqué sur semences sur le nombre de plantes attaquées par la géomyze à 3 feuilles (figure 1).

Si les niveaux de protection évalués en début de cycle étaient comparables entre les deux doses, l’écart sur le rendement s’élève à 15 % au bénéfice de la protection à la dose de 0,614 mg/grain (97 q/ha) par rapport à la dose de 0,475 mg/grain (84 q/ha).

Figure 1 : Comparaison de solutions pour la protection du maïs contre la géomyze – Résultats d’essai réalisé à Ploudalmézeau (29) en 2023

Figure 1 : Comparaison de solutions pour la protection du maïs contre la géomyze – Résultats d’essai réalisé à Ploudalmézeau (29) en 2023

Les résultats acquis depuis 2019 avec des doses variant de 0,47 à 0,75 mg de cyantraniliprole par grain tendent à montrer une relation positive entre la dose de substance active appliquée par grain et l’efficacité de la protection (figure 2). Même si le nombre de références est faible, l’efficacité est en moyenne de l’ordre de 55 % à 0,475 mg/grain, contre 65 % lorsque la dose est supérieure ou égale à 0,614 mg/grain.

Dans le cadre de la dérogation pour 2024, la solution Lumiposa reste techniquement satisfaisante pour protéger le maïs contre les attaques de géomyze, mais son efficacité diminue au gré des doses autorisées, régulièrement révisées à la baisse.

Figure 2 : Efficacité sur géomyze de la solution Lumiposa appliquée en traitement de semences sur maïs - synthèse de 4 essais 2019 à 2023

La spécialité Karaté 0.4G, comme tous les produits microgranulés à base de lambda-cyhalothrine, ne peuvent plus être appliqués avec diffuseur.

Certains microgranulés pénalisés par leurs conditions d’emploi

Dans ces mêmes conditions d’attaques importantes, les produits microgranulés à base de pyréthrinoïdes (Belem 0.8MG, Karaté 0.4GR) appliqués avec diffuseur ont présenté, en 2023, des efficacités comprises entre 22 et 43 % au stade 3 feuilles (figure 1). Un score inférieur à Lumiposa et en net retrait par rapport aux résultats acquis avec ces produits au cours des années antérieures. Cependant, ces produits microgranulés ont permis d’obtenir un niveau de rendement comparable à la solution Lumiposa appliquée à faible dose pour Belem 0.8MG et à forte dose pour Karaté 0.4GR.

A noter que les conditions d’emploi de cette dernière spécialité, comme celles de tous les produits microgranulés à base de lambda-cyhalothrine (dont les produits de la gamme Trika), ont évolué au cours de l’année 2023 : ils doivent être enfouis à plus de 4 cm de profondeur. Ces produits ne peuvent donc plus être appliqués avec diffuseur, ce qui n’est pas compatible avec une efficacité satisfaisante.

Seul Belem 0.8MG - qui demeure applicable avec diffuseur - conserve un intérêt technique pour la protection contre la géomyze (figure 3), même si ce produit n’est autorisé que pour la protection contre les ravageurs du sol (usage comprenant les taupins, et non la géomyze). L’efficacité de Belem 0.8MG sur géomyze est du même ordre de grandeur que sur taupins, alors que l’intérêt technique de la solution Lumiposa n’a été mis en évidence que sur géomyze. En cas de risque taupin, la solution Belem 0,8MG permet donc de jouer sur les deux tableaux.

Figure 3 : Comparaison de la protection du maïs contre la géomyze à l’aide de produits microgranulés appliqués avec ou sans diffuseur – Synthèse des essais 2020 et 2021

Figure 3 : Comparaison de la protection du maïs contre la géomyze à l’aide de produits microgranulés appliqués avec ou sans diffuseur – Synthèse des essais 2020 et 2021

Réagissez !

Merci de vous connecter pour commenter cet article.

Se connecter
Ou connectez-vous avec
Pas encore inscrit ?
Créer un compte
Mot de passe oublié

Un email vous sera envoyé pour réinitialiser votre mot de passe.