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Mildiou de la pomme de terre : diversifier les moyens de lutte pour préserver l’efficacité des fongicides

Une souche de Phytophtora infestans, agent responsable du mildiou de la pomme de terre, pose des soucis de dérive d’efficacité des fongicides en Europe du Nord. La France est aujourd’hui épargnée et seul le respect des bonnes pratiques de protection pourra garantir le maintien de cette situation.

Découverte au Danemark en 2018, la souche 43_A1 de P. infestans s'avère résistante à la mandipropamide, une substance de la famille des Carboxylic Acides Amides (CAA). Cette souche n’a pas encore été détectée à ce jour en France. Les suivis épidémiologiques se poursuivent et des tests de sensibilité vis-à-vis des fongicides de la famille des CAA seront conduits par ARVALIS en 2023, en relation avec l’université d’Aarhus au Danemark.

L’émergence de ce variant résistant en Europe du Nord-Ouest n’a donc pas d’impact particulier aujourd’hui sur les programmes fongicides en France. Néanmoins, le cas danois invite à gérer le risque mildiou par une diversification plus grande des moyens de lutte, une gestion agronomique rigoureuse des parcelles et de leur environnement, et une exploitation des nouvelles variétés et des solutions de biocontrôle disponibles. Mettre en œuvre ces bonnes pratiques de protection des plantes permettra de retarder l’émergence et la sélection des résistances.

Réduire l’inoculum primaire grâce à l’agronomie

La réduction de l’inoculum primaire via la prophylaxie contribue à réduire la pression maladie et à retarder les premières contaminations. Le premier pilier de la gestion de la résistance est d’utiliser des leviers non chimiques. D’une part, il s’agit de gérer les tas de déchets avant plantation, d’éliminer les repousses et de mettre en place des rotations longues. D’autre part, on peut utiliser la résistance variétale et les agents de biocontrôle pour réduire la taille des populations et la sélection d’éventuelles souches résistantes.

Evaluer la nécessité d’intervenir

Un outil d’aide à la décision intégrant le modèle Mileos® permet d’évaluer les périodes à risque mildiou en fonction des conditions météorologiques et du cycle de vie du champignon. Mileos® permet d’intervenir uniquement lorsque nécessaire, en réduisant le nombre d’applications par rapport à un programme systématique. Cela permet de réduire la pression de sélection fongicide et retarde la sélection de la résistance. Il est aussi recommandé de surveiller l’état sanitaire de la région via les bulletins de santé du végétal (BSV).

Diversifier au maximum les programmes fongicides

Si un traitement fongicide est nécessaire, il faut alors appliquer une protection la plus diversifiée possible :

  • Alterner au maximum les modes d’actions ;
  • Intervenir de manière préventive préférentiellement ;
  • Appliquer un maximum de 50 % du nombre total de traitements prévus avec des fongicides de la famille des CAA ;
  • Appliquer les CAA en mélange avec un mode d’action différent, limiter les applications de produits solo ;
  •  En mélange avec un autre mode d’action, appliquer les CAA au maximum deux fois consécutivement. Si un mélange n’est pas possible, appliquer les CAA en alternance stricte.

Ces recommandations sont extrapolables à tous les modes d’action.

Téléchargez les programmes préconisés sur variétés sensibles.
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Pour rappel, les produits anti-mildiou autorisés en France contenant des CAA sont : Revus®, Revus Top®, Zampro Max®, Optimo-Tech®, Voyager®, Remiltine Flex®, Banjo Forte®. A noter que le Revus® est un produit contenant la mandipropamide solo. Il faut aussi considérer le Revus Top® comme un produit solo car la molécule associée à la mandipropamide, le difénoconazole, n’a pas d’efficacité contre le mildiou.

Pour en savoir plus, retrouvez la synthèse des essais combinaison de leviers contre le mildiou en replay.

Tirer les enseignements du cas danois

Le cas danois appelle donc à renforcer la lutte contre le mildiou par une meilleure gestion préventive du risque. Si le panel de fongicides anti-mildiou en France reste large, il n’est pas à l’abri de retraits de molécules. De plus, les tendances de long terme (hivers doux, spécialisation des régions productrices, agrandissement des soles en pomme de terre) restent plutôt favorables à la survie hivernale et à l’établissement d’une grande population de P. infestans. Ceci d’autant plus que les tas de déchets ne sont pas correctement gérés et que la plupart des variétés cultivées sont sensibles à la maladie. La gestion optimisée du risque mildiou passera donc obligatoirement par une diversification plus grande des moyens de lutte, parmi lesquels les fongicides ne sont qu’une facette.

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