Articles et actus techniques
Champagne-Ardenne / Lorraine

Lutte contre les vulpins en blé tendre : combiner leviers agronomiques et applications phytos

Evolution des matières actives, résistances accrues des graminées érodant l’efficacité des herbicides… : le contexte rend désormais incontournable le recours à des leviers agronomiques, en amont des applications chimiques. Lors de la campagne blé tendre 2024/2025, des semis plus tardifs ont ainsi permis une meilleure gestion des adventices. D’autres techniques culturales sont également à envisager, comme la rotation ou le labour intermittent. Voici les stratégies possibles pour les prochains semis.

Vulpins dans jeunes semis de céréales en Champagne-Ardenne

Enclencher ou poursuivre la combinaison de leviers : une démarche essentielle

Après les incertitudes évoquées sur le statut du flufénacet, nous sommes désormais fixés : le retrait de l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) sera effectif le 10 décembre 2025. Cependant, un délai de vente est accordé jusqu’au 10 juin 2026 et un délai d’utilisation jusqu’au 10 décembre 2026. Cela permettrait de bénéficier encore de la substance active, d’ici l’arrivée de nouveaux modes d’action jugés efficaces (malheureusement, toujours pas de date exacte communiquée). Pour les désherbages d’automne, il reste donc, en principales molécules, le flufénacet, le prosulfocarbe, le chlortoluron, la pendiméthaline et le diflufénicanil.

Dans ce contexte réglementaire toujours incertain, l’utilisation de leviers agronomiques reste primordiale pour limiter la pression adventices et maximiser, dans un second temps, la réussite des interventions de désherbage chimique. Les herbicides seuls peuvent de moins en moins répondre à une gestion durable des adventices, d’où l’utilité de la rotation, du labour intermittent (une année sur trois ou quatre), du décalage de la date de semis, voire des faux-semis, etc.

Les résultats herbicides de la campagne 2024/2025

Différentes interventions herbicides sont évaluées au sein des essais ARVALIS, au regard des pratiques réalisées en plaine. Le désherbage de prélevée dispose de plusieurs avantages :

  • Une bonne souplesse d’application : le stade d’application, après le semis, est moins strict que pour la postlevée, qui voit ses efficacités affectées en cas de positionnement trop tardif.
  • Une réintervention est possible en postlevée en cas de nécessité, résultant donc en la réalisation d’un programme double automne.

Depuis cette année, les modalités évaluées dans nos essais sont celles SANS FLUFENACET, pour préparer l’avenir du fait de l’arrêt de son utilisation fin 2026, et évaluer de nouvelles associations.

Les désherbages de prélevée seule atteignent des performances moyennes à bonnes dans les essais ARVALIS 2024/2025, avec une efficacité moyenne de 58 % pour les modalités testées sur vulpins. C’est malheureusement entre 10 % à 20 % d’efficacité en moins que les solutions qui proposaient du flufénacet : d’où l’intérêt de mobiliser des leviers agronomiques en amont.

Pour les désherbages de postlevée seule, les efficacités sont inférieures, autour de 45-50 %, soit 20 % à 30 % de moins que les solutions avec flufénacet. Leur positionnement doit donc vraiment se faire au stade précoce des adventices (1 feuille), pour limiter les pertes d’efficacités en cas d’intervention trop tardive.

La réalisation d’un programme double automne devient donc de plus en plus nécessaire, en plus des leviers agronomiques, pour gérer la pression adventices.

Figure 1 : Résultats des efficacités herbicides sur blé tendre d’hiver - cible vulpins - modalités testées en prélevée, postlevée, programme « double automne » et programme « triple » - Synthèse des essais nationaux ARVALIS en 2024/2025

Figure 1 : Résultats des efficacités herbicides sur blé tendre d’hiver – cible vulpins - modalités testées en prélevée, postlevée, programme « double automne » et programme « triple » - Synthèse des essais nationaux ARVALIS en 2024/2025

Prélevée

(Rappel → solutions sans flufénacet (donc pas de modalité Mateno), vis-à-vis du contexte futur)

  • Défi 3 l + Codix 2 l permet la meilleure efficacité en prélevée (55 %) sur vulpins, grâce à l’association de pendiméthaline et de dff au prosulfocarbe. Le rapport efficacité/coût est même favorable. Cela peut être intéressant sur de faibles infestations, sinon il faudra intervenir avec une solution de postlevée.
  • L’association de Défi (prosulfocarbe) à Prowl 400 (pendiméthaline) ou Shvat (chlortoluron) est moins efficace : respectivement 41 % et 28 %, pour un prix non justifié. Un passage avec une solution de postlevée est nécessaire.

Postlevée (à 1 feuille)

(Rappel → solutions sans flufénacet (donc pas de modalité Fosburi), vis-à-vis du contexte futur)

  • L’association Constel 3,75 l + Défi  2,5 l est relativement intéressante pour de faibles infestations, avec une efficacité de 62 %. Le rapport efficacité/coût est très bon. Attention cependant au risque de phytotoxicité suivant les conditions d’application (profondeur de semis, pluviométrie, etc.)
  • Constel seul (chlortoluron + dff) est clairement insuffisant, avec une efficacité de 25 % et un coût associé relativement élevé. Cela est cependant à relativiser suivant les conditions pédoclimatiques, pour lesquelles de meilleures efficacités peuvent parfois être observées.

→ Dès lors que les populations de vulpins sont denses et/ou résistantes, le programme d’automne (prélevée + postlevée) est un passage obligé. Dans ces situations, quelques programmes sortent du lot.

Programmes automne

(Rappel → solutions sans flufénacet, vis-à-vis du contexte futur)

  • L’association Défi 3 l + Codix 2 l en prélevée, suivi de Shvat 3,6 l + Beflex 0,35 l à 1 feuille, apporte la meilleure efficacité (82 %).
  • La modalité Défi 3 l + Prowl 400 2 l en prélevée, suivie de Constel 4,5 l 1F, est proche en efficacité (78 %), tout comme la modalité Défi 3 l + Codix 2 l en prélevée, suivie de Shvat 3.6 l 1F, avec une efficacité de 76 %.
  • En rapport efficacité/coût, ce dernier programme cité (Défi 3 l + Codix 2 l en prélevée / Shvat  3,6 l 1F) semble le plus intéressant (présence de prosulfocarbe, pendiméthaline, dff, chlortoluron), en situation d’infestation significative en vulpins.

Programme « triple » et programme prélevée + sortie Hiver

(Rappel → solutions sans flufénacet, vis-à-vis du contexte futur)

  • Le programme Défi 3 l + Codix 2 l en prélevée, suivi de Atlantis Pro 1,5 l + Actirob 1 l + Actimum 1 l à tallage présente une efficacité plus intéressante (90 %). Cependant, son prix/ha est relativement élevé par rapport à la différence d’efficacité apportée. D’autant plus qu’en situations de résistances, de plus en plus répandues, son efficacité sera moindre. Il est d’ailleurs conseillé de réaliser des tests de résistance (souvent proposés par les organismes stockeurs), lorsqu’il y a une incertitude sur le statut de ces résistances à la parcelle.

Désormais, les passages uniques (en pré ou post) semblent aujourd’hui atteindre une limite d’efficacité, avec les solutions restant à disposition, sauf en situation de faible infestation. La prélevée conditionne tout de même en grande partie l’efficacité et la régularité des programmes d’automne (ou de sortie d’hiver que certaines parcelles peuvent encore se permettre), qui sont donc à privilégier. A noter qu’en cas de semis  tardifs, préférer des applications de prélevée, car la garantie de disposer de créneaux favorables à une postlevée n’est pas assurée en cas d’hiver pluvieux ou de gel.

Il faudra rester vigilant à l’alternance des modes d’action dans la construction du programme double automne. La règle est simple : utiliser une seule fois une matière active par campagne, c’est-à-dire, varier les modes d’action utilisés en prélevée et en postlevée.

D’un point de vue sélectivité, les associations les plus performantes en désherbage restent les plus à risque. Observer des symptômes de phytotoxicité est un mal parfois nécessaire. Ils restent la plupart du temps acceptables et s’estompent avec le temps. Pour les limiter, il est essentiel de bien enfouir les grains lors du semis et d’éviter une intervention chimique en amont de pluies significatives annoncées.  

Quelques propositions de programme herbicides contre les vulpins

Les programmes doivent être définis en prenant en compte le niveau de salissement de la parcelle et la suspicion de résistance aux inhibiteurs de l’ALS (sulfonylurées).

En rattrapage de printemps, l’efficacité des produits foliaires peut être limitée : privilégier les applications précoces. Bien qu’ils ne soient plus testés dans nos essais depuis cette année, les produits à base de flufénacet sont toujours présentés dans nos préconisations, tant que leur période de vente et d’utilisation est possible.

Figure 2 : Propositions de programmes herbicides contre les vulpins en blé tendre d’hiver

Figure 2 : Propositions de programmes herbicides contre les vulpins en blé tendre d’hiver
Les noms de produits cités ne sont pas exhaustifs, et les prix sont donnés à titre indicatif. Les propositions de produits de sortie d’hiver ne sont pas présentées.

Réagissez !

Merci de vous connecter pour commenter cet article.

Se connecter
Ou connectez-vous avec
Pas encore inscrit ?
Créer un compte
Mot de passe oublié

Un email vous sera envoyé pour réinitialiser votre mot de passe.