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Champagne-Ardenne

Céréales : pas d’urgence pour les apports d’azote à tallage

Selon le calendrier d’épandage des engrais minéraux, les apports d’azote sont autorisés sur les cultures d’automne depuis le 1er février. Toutefois, même si les conditions peuvent leur être propices, ils peuvent encore attendre quelques semaines sur blé et orge d’hiver. Rappelons que limiter la dose à ce stade sera opportun.

Parcelles d’essais azote sur blé tendre

Etat des cultures et fournitures du sol en sortie d’hiver

Côté plantes, on trouve une majorité des parcelles avec des biomasses intéressantes et des tallages herbacés importants pour les semis réalisés avant le 15 octobre. Ce développement a été favorisé par les températures automnales et hivernales douces, et des conditions azotées non limitantes grâce à une minéralisation automnale non négligeable. Bien sûr, dans les zones avec des ressuyages plus lents, voire avec des conditions hydromorphes, ce développement a été plus limité. Pour les semis de blé éparses réalisés après l’arrivée des pluies du 15 octobre, le développement est moins marqué et les stades vont de 3 feuilles à mi-tallage.

Ainsi, les dates d’apparition du stade épi 1 cm vont être étalées en plaine : les premiers semis (10 octobre) semblent être en avance d’environ 14 jours, avec une date autour du 15 mars, et les semis plus tardifs (10 novembre) sont dans les dates classiques (fin mars/début avril).

Du côté de la fourniture en azote du sol, les premiers retours des reliquats sortie d’hiver (RSH) sur trois horizons semblent indiquer des valeurs dans la moyenne des cinq dernières années, malgré des précipitations hivernales très abondantes. Les pertes d’azote par lixiviation ont sans doute été importantes, mais semblent avoir été en partie compensées par des niveaux de minéralisation importants. La synthèse régionale des RSH 2024 n’est pas encore disponible et sera communiquée prochainement pour réaliser les plans prévisionnels de fumure (noter qu’il est encore temps de réaliser des RSH 0-90 cm sur les parcelles : disposer d’une valeur pour sa parcelle reste le moyen le plus précis pour s’ajuster au contexte).

En s’appuyant sur ces constats, quel raisonnement adopter pour les apports à tallage ?

Figure 1 : Azote aérien absorbé (Nabs) par le blé tendre, 69 données 2016-1023 – contextes barrois, limon et craies en Champagne-Ardenne

Figure 1 : Azote aérien absorbé (Nabs) par le blé tendre,  69 données 2016-1023 – contextes barrois, limon et craies en Champagne-Ardenne

Premier apport : « ni trop tôt, ni trop fort »

Bien que les stades soient avancés pour les premiers semis, il y a encore une certaine souplesse d’une à deux semaines pour ceux n’ayant pas encore réalisé les premiers apports d’azote, en particulier pour les semis tardifs. En effet, nous avons souvent pour habitude de réaliser les premiers apports trop tôt (en dehors des sols superficiels les années humides) :

  • Les besoins azotés du blé ou de l’orge sont de 60 kg N/ha maximum jusqu’à épi 1 cm, provenant principalement des fournitures du sol. La vitesse de croissance est la condition principale qui permet d’assurer une bonne valorisation des apports à tallage. Elle est dépendante des températures et du stade de la culture. La période actuelle douce est favorable à une bonne valorisation à tallage, les prévisions météo à deux semaines indiquent un maintien de ces températures.
    Pour les semis décalés, rien ne sert de se précipiter !
  • Ne pas fertiliser trop tôt permet également de désherber avant les apports. Il convient en effet de réaliser les apports d’azote une fois les désherbages de sortie d’hiver réalisés afin de ne pas favoriser les adventices graminées qui sont nitrophiles.

Ces dates-clés restent à adapter selon le contexte de la parcelle, mais n’oubliez pas qu’une légère décoloration à tallage ne se traduit pas par une perte en rendement.

La quantité d’azote apportée ne doit pas non plus être trop importante : dans l’idéal 40 kg N/ha, voire
60 kg N/ha dans les situations les moins correctement implantées ou avec peu de fourniture en azote du sol.

Se limiter à ces doses permet :

  • De répondre au juste besoin des plantes afin de maximiser le Coefficient Apparent d’Utilisation (CAU) de l’apport, qui est souvent faible (autour de 60 %, alors que c’est autour de 80 % lors de la montaison). A tallage, une plante absorbe environ 0,5 kg N/ha/jour, lors de la montaison, c’est 2 à 4 kg N/ha/jour. Rien ne sert de forcer les doses, l’azote ne rentrera pas plus dans la plante !
    Il sera même soumis à des pertes et ne sera pas complètement disponible lorsque la plante en aura besoin (organisation dans le sol).
  • De maximiser les teneurs en protéines (figure 2) en reportant l’azote qui n’est pas mis à tallage en fin de cycle, sans pour autant nuire au rendement (différences non significatives).
  • Enfin, d’éviter d’avoir des céréales avec des tallages excessifs pour les premiers semis (l’azote n’accélère pas le rythme d’apparition des talles mais sa disponibilité augmente la probabilité qu’une talle soit effectivement émise). Comme en 2023, malgré ces tallages abondants, il n’y aura pas forcément un meilleur rendement (tiges qui consomment de l’eau et de l’azote sans forcément monter à épi). Le risque de verse et la sensibilité aux maladies du feuillage seront donc plus faibles.

Figure 2 : Ecart de teneur en protéines entre les stratégies tallage renforcé et dernière feuille (DF) renforcé

Figure 2 : Ecart de teneur en protéines entre les stratégies tallage renforcé et dernière feuille (DF) renforcé

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