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Implantations difficiles : faut-il apporter du phosphore en sortie d’hiver sur céréales ?

Implantations difficiles, abats d’eau, enracinements possiblement limités des céréales d’hiver… Un apport de phosphore en sortie d’hiver est-il pertinent dans ces situations ? Eléments de réponses avec les derniers essais réalisés sur blé.

épandeur dans du blé tendre

Il est généralement admis que les céréales à paille ont besoin de phosphore en début de cycle. Elles en absorbent tout au long de leur croissance, mais c’est en début de tallage que la disponibilité de cet élément est la plus déterminante. En effet, le phosphore stimule la croissance racinaire. Une carence précoce peut donc elle avoir des répercussions sur le reste du cycle, en limitant l’accès aux réserves en éléments minéraux et en eau du sol, du fait d’une moindre colonisation du sol par les racines.

Que faire suite à un automne et un hiver pluvieux ?

Faut-il pour autant apporter du phosphore sur des blés qui ont du mal à démarrer suite à un automne et un hiver humide ?

Dès les années 80, l’institut s’est penché sur la question : sur 51 parcelles du Sud-Ouest marquées par un excès d’eau hivernal, seulement deux avaient présenté un gain significatif de rendement (supérieur à 5 q/ha), après un apport de phosphore au tallage.

L’apport de phosphore sur un blé mal parti en situation marquée par un hiver pluvieux a été retesté dans les années 2010-2012. La synthèse des 17 essais (issue de 2 réseaux différents) a fait ressortir un gain moyen brut de 1,1 q/ha suite à un apport au tallage du blé de 30 ou 40 kg P2O5/ha, sous forme de superphosphate. Ce gain n’était significatif que dans 5 des 17 essais (figure 1). Ce gain moyen devient nul si on prend en compte le surcoût de l’engrais.

Figure 1 : Gain sur le rendement d’un apport de phosphore au tallage du blé tendre – Synthèse de 17 essais 2011-2012 et 2012-2013

Figure 1 : Gain sur le rendement d’un apport de phosphore au tallage du blé tendre – Synthèse de 17 essais 2011-2012 et 2012-2013

P0 : témoin sans apport de phosphore ; P30, P40 et P60 : apport de respectivement 30, 40 et 60 kg P2O5/ha sous forme superphosphates.

Source : 6 essais ARVALIS et 11 essais des partenaires (Chambres d’agriculture du 44, 49, 59, 60, 62, 72, 85, Calliance, Cerena)

De plus, la pluviométrie hivernale n’explique pas les gains de rendement. En revanche, ces derniers sont constatés dans les sols faiblement pourvus en phosphore. Cela confirme que l’analyse de sol permet d’identifier les situations à risque : un apport de phosphore en sol correctement pourvu n’a pas d’effet « stimulant » dans ces conditions.

La teneur du sol en phosphore est un bon indicateur du risque de carence

Contrairement à l’azote et au soufre, le phosphore est peu mobile dans le sol. Une analyse de sol réalisée tous les 5 ans sur une même profondeur (20 cm conseillés), sur une même zone (représentative) de la parcelle permet de suivre l’évolution des teneurs en phosphore.

Depuis les années 90, le Comifer a mis au point des seuils de risque par type de sol et par exigence des cultures : Timpasse et Trenforcé. Une situation où l’analyse de sol révèle une teneur en phosphore inférieure à Trenforcé sera la plus à même d’extérioriser une carence en phosphore. Dans ce cas, il est recommandé d’apporter une dose renforcée de phosphore sous peine d’impact sur le potentiel de la culture. A l’inverse, une teneur supérieure à Timpasse ne réclame aucun apport de phosphore.

Pour rappel, le blé tendre est considéré comme une culture peu exigeante vis-à-vis du phosphore, tandis que le blé dur, l’orge et le blé sur blé sont moyennement exigeants.

Retrouvez tous les seuils selon le type de sol et la culture pour gérer les apports de phosphore
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Des carences peuvent s’exprimer en sols faiblement pourvus ou très longtemps engorgés

Dans les sols faiblement pourvus en phosphore ou très longtemps engorgés d’eau (carence induite due à un mauvais fonctionnement du système racinaire), il est possible de voir apparaître courant tallage des symptômes de carence : foyers avec un rougissement ou jaunissement de la pointe des vieilles feuilles, un rougissement des gaines et une réduction du tallage.

Pour plus d’informations sur la carence en phosphore, consultez la fiche d’ARVALIS consacrée à cet accident.

En cas de carence avérée, il est recommandé de réaliser un apport de phosphore dès l’apparition des symptômes. La dose minimale à apporter est de 50 kg/ha de P2O5 sous forme de superphosphate ou de phosphate d’ammonium. Les engrais foliaires ne peuvent apporter cette quantité.

La correction n'est que partielle si l'application a lieu après le début du tallage. Dans tous les cas, il n'est pas possible de corriger complètement la carence.

Compenser les exportations en phosphore

Dans les sols correctement pourvus, selon la teneur à l’analyse de terre et en particulier le positionnement par rapport au seuil Timpasse, le conseil est soit de ne pas réaliser d’apport de phosphore, soit de compenser les exportations par les grains. Le blocage de la fumure sur l’espèce la plus exigeante de la rotation peut être envisagée à la condition de ne pas dépasser deux ans entre deux apports. Un apport annuel peut être recommandé dans les sols les plus calcaires et/ou proches des teneurs P renforcées. Un apport de phosphore sur céréales à paille à l’occasion d’un apport d’azote peut donc actuellement s’envisager dans ce cadre-là (stratégie d’entretien à la rotation).

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