Blé tendre d’hiver : des rendements plutôt bons, mais hétérogènes
Tout comme les orges, les récoltes de blé tendre se sont achevées globalement tôt, dès la semaine du 14 juillet. Bons résultats et hétérogénéité sont les maîtres mots de cette campagne 2024-2025.
Des premiers semis décalés suite à la pluviométrie automnale
En raison des pluies enregistrées sur la première quinzaine d’octobre, la grande majorité des semis de blé ont été réalisés dans la deuxième quinzaine d’octobre et la première décade de novembre. Au total, 392 000 ha de blé ont été semés en Champagne-Ardenne (source Agreste).
Cependant, cette pluviométrie moins conséquente dès mi-octobre, a laissé place à des températures particulièrement douces pour la saison. Ces différents facteurs ont été globalement favorables à l’activité des pucerons : un risque modéré à élevé a été évalué jusque début novembre, à partir du Bulletin de Santé du Végétal (BSV). Paradoxalement, peu de symptômes de JNO (jaunisse nanistante de l’orge) ont été constatés au printemps, suggérant une moindre activité des pucerons et une protection optimale de la majorité des parcelles. En termes de désherbage, les conditions climatiques ont permis davantage de passages en prélevée et une augmentation des programmes double automne.
Un rayonnement favorable au printemps, mais une sécheresse marquée
Les cumuls de pluies et de températures positionnent l’année 2025 dans la moyenne sur 10 ans. Les biomasses en sortie d’hiver sont dans la moyenne pluriannuelle, tout comme l’arrivée du stade épi 1 cm, autour du 25 mars. Les semis plus tardifs, réalisés dans de plus ou moins bonnes conditions, ont pu limiter le tallage. Fait marquant de l’année : dès le début du mois de mars les pluies se font rares (figure 1). Les comptages des talles à plus de 3 feuilles (les plus susceptibles de monter à épi) sont en léger retrait par rapport à la moyenne pluriannuelle.
L’absence de pluie se poursuit en avril (figure 1), la concurrence pour les ressources en eau et en azote favorise la régression de talles. La densité épis s’en trouve réduite de 10 % en Craie par rapport à la moyenne sur 10 ans (figure 2). En territoires argilo-calcaires, cette tendance est moins marquée en comparaison aux références historiques locales.
En effet, sur la région, l’hétérogénéité commence à se voir dès la composante de rendement épis/m², à la faveur des cumuls de pluies perçus sur chaque territoire. Les zones plus arrosées s’en sortent plutôt mieux, avec un nombre d’épis au m² un peu moins réduit.
Figure 1 : Pluviométrie enregistrée dans le quart Nord-Est entre mi-février et mi-mai
Figure 2 : Nombre d’épis/m² en fonction du nombre de talles à plus de 3 feuilles au stade épi 1 cm - Observatoire ARVALIS
L’autre fait marquant de cette campagne est l’accélération significative des stades : l’épiaison est atteinte avec une semaine voire plus d’avance (autour du 10 mai). La durée de montaison s’en trouve raccourcie de 5 jours, et a pu accentuer la régression de talles.
Cependant, les niveaux de rayonnement enregistrés sont très favorables (figure 3), pouvant contrebalencer en partie l’effet de la sécheresse, et ont engendré de bonnes fertilités épis (+11 % par rapport à la moyenne sur 10 ans) : cette composante de rendement permet de compenser le manque d’épis et d’atteindre un nombre de grains/m² autour de 22 000 grains/m² (figure 4), dans la moyenne haute des 10 dernières années en Craie et Barrois. A noter, la disparité des pluies sur le territoire, et le déficit hydrique plus marqué en terres superficielles, pouvant limiter le potentiel sur ces composantes de rendement.
Figure 3 : Rayonnement journalier (courbe noire et points jaunes) et pluviométrie (barres bleues) au cours de la montaison jusqu’à maturité du blé
Figure 4 : Nombre de grains /m² en fonction du nombre d’épis/m² - Observatoire ARVALIS
L’autre effet bénéfique de l’absence de pluies au printemps est la quasi absence de maladies foliaires. La phase de remplissage démarre donc de manière optimale sur ce paramètre, bien que l’apparition de la rouille brune ait pu être impactante dans les parcelles non protégées et/ou sur variétés sensibles.
Une phase de remplissage du grain globalement favorable, malgré des températures échaudantes
Au stade grain laiteux, les conditions de température et de rayonnement ont été jusque-là favorables : les niveaux de PMG (poids de mille grains) sont sur des trajectoires normales à bonnes (figure 5). En revanche, la seconde phase de remplissage est caractérisée par des températures relativement élevées, parfois même échaudantes durant plusieurs jours (figure 6). Ces jours échaudants subis avant la fin de la période de sensibilité (grain pâteux) font perdre quelques grammes de PMG. Au final, les PMG relevés dans notre observatoire Craie sont supérieurs d’environ 5 % à nos références des 10 dernières années.
Figure 5 : Cinétique de remplissage et PMG - Observatoire ARVALIS
Figure 6 : Températures enregistrées et Tmax échaudantes durant le remplissage des grains
Finalement, les rendements sont plutôt bons, en moyenne 10 à 15 % supérieurs à la moyenne des 10 dernières années (en comptant 2024). Il faut tout de même noter une hétérogénéité marquée sur le territoire, très liée aux pluviométries locales au cours du printemps (figure 7 ; N.B. : une partie des essais de l’observatoire, ayant bénéficié de conditions pédoclimatiques favorables, ne reflètent pas toujours l’hétérogénéité à l’échelle de la plaine).
Figure 7 : Rendements enregistrés dans les essais Nord-Est - Observatoire ARVALIS
Malgré un printemps plutôt sec, contraignant l’absorption des apports azotés, et de bons rendements causant un phénomène de dilution, les teneurs en protéines enregistrées restent raisonnables, avec une moyenne autour de 11 % (figure 8).
Figure 8 : Teneurs en protéines enregistrées dans les essais Nord-Est - Observatoire ARVALIS
Le potentiel de PS (poids spécifiques) mis en place au tout début remplissage était bon, voire très bon (> 80 kg/hl dans la majorité des situations), en lien avec une absence de maladies et une contrainte relativement limitée sur la taille des enveloppes. Cependant, la moisson a été interrompue quelques jours suite aux pluies du 5 au 8 juillet, avec des cumuls pouvant aller jusque 50 mm. Ainsi, certains PS se sont retrouvés dégradés, parfois fortement (4 à 5 points), mais restent toutefois dans les normes commerciales de 76 kg/hl.
Par ailleurs, des lots de blés ont révélés une présence d’ergot (sclérotes d’ergot) : bien que n’ayant pas d’incidence sur le rendement, des problématiques sanitaires peuvent être induites par le champignon. Au champ, des leviers adaptés (labour pour enterrer les sclérotes, désherbage, rotation, etc.) doivent être mis en place dans la mesure du possible pour éviter d’avoir à nouveau cette problématique à la prochaine moisson.
Consultez la vidéo : Comment gérer l'ergot en grandes cultures ?
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