Résultats d’essais

Des levées de vulpin qui s’échelonnent de plus en plus

Depuis quelques années, le salissement des parcelles de céréales en vulpin et en ray-grass constaté en fin de campagne, malgré des désherbages d’automne supposés efficaces, interroge sur les levées des graminées. Plusieurs hypothèses ont été explorées pour expliquer le phénomène.

Vulpin dans du blé à épiaison

« Je ne comprends pas : je n’avais aucun vulpin après mon désherbage d’automne et j’en vois quand même beaucoup à épiaison du blé ». Voilà une remarque que nous remontent de plus en plus d’agriculteurs depuis 4 ou 5 ans.

Pour expliquer cette recrudescence de vulpin au printemps, nous avons travaillé sur deux hypothèses, en écartant tout scénario de résistance aux herbicides d’automne.

Des populations de vulpins à levées printanières ?

Première hypothèse : nous aurions affaire à des populations de vulpins ayant une levée préférentielle au printemps ? Comme le désherbage est aujourd’hui massivement réalisé à l’automne, ces populations échapperaient aux applications, en levant en mars-avril. Cette hypothèse présente deux points faibles : d’une part, cela supposerait l’existence d’une population de printemps génétiquement différente de celle d’automne. Même si les mécanismes génétiques impliqués dans la levée de dormance et la germination sont complexes, il faudrait une pression de sélection - via les applications d’automne - forte, constante et très longue pour sélectionner cette population « de printemps ». Cela semble donc peu probable. D’autre part, ces levées tardives auraient plus de mal à réaliser un cycle complet sur trois mois. Les observations en plaine montrent des individus restant plutôt développés, qui seraient davantage issus de levées automnales/hivernales.

Deuxième hypothèse : nous sommes en présence de très gros stocks semenciers, issus d’échecs successifs ? Quand bien même les herbicides arrivent à réaliser 95 à 98 % d’efficacité, sur une population de 500 à 1000 vulpins/m², il restera des individus, qui seront en mesure de se reproduire et faire des graines. Et 10 vulpins/m² se remarquent beaucoup plus qu’1 ou 2/m² !

Des suivis de levées pour mettre à jour les références

Afin de répondre plus précisément à ces questions de levées - et surtout d’échecs constatés, nous avons réalisé des suivis de levées de vulpin dans les essais dédiés aux herbicides sur les campagnes 2022 et 2023 (figure 1).

Figure 1 : Suivi des levées de vulpin sur les automnes 2021 et 2022, dans cinq essais herbicides/vulpin d’ARVALIS
Figure 1 : Suivi des levées de vulpin sur les automnes 2021 et 2022, dans cinq essais herbicides/vulpin d’ARVALIS

Le protocole était volontairement simple afin de ne prendre en compte que les nouvelles levées. Une fois par mois, les vulpins présents sont comptabilisés puis détruits afin de laisser une zone nue sans plante pour le relevé du mois suivant.

Le profil des levées suit celui obtenu dans les années 80-90. Une levée massive est constatée en automne, puis elles s’arrêtent mi-janvier. Une dernière levée, qui représente 10 % des levées totales environ, est possible sur le mois de mars.

En revanche, ces suivis récents mettent en avant des levées très tardives, en décembre, qui n’avaient pas été recensées dans les travaux conduits il y a 30 ans. Ceci suggère que les hivers moins rigoureux favorisent des levées beaucoup plus échelonnées qu’autrefois – comme constaté depuis très longtemps sous le climat Anglais.

La persistance d’action des herbicides d’automne ne couvre plus la période de levée des vulpins

Ceci nous amène à formuler une 3e hypothèse : la persistance d’action des herbicides d’automne ne couvre plus la période de levée des vulpins.

D’un côté, les levées de vulpins sont plus échelonnées, avec des niveaux parfois importants sur décembre. De l’autre, les dates d’application des herbicides évoluent peu, avec, en fonction des dates de semis, des applications de prélevée centrées sur début octobre et des postlevées précoces réalisées fin octobre/début novembre. En tenant compte des persistances d’action des herbicides, de l’ordre de 15 à 25 jours, leur période de contrôle ne couvre pas celle de levée des vulpins. Dès lors, au-delà des levées printanières, des individus de fin d’année peuvent lever et faire leur cycle dans la culture. Les tours de plaine de janvier peuvent même passer à côté de ces individus, au stade filament.

Pour gérer ces levées très tardives, va-t-on s’orienter vers des programmes d’automne renforcés à trois passages ou décaler les semis ? Avant d’aller plus avant dans la recommandation, les suivis de levée vont se poursuivre cette année.

1 commentaire

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  • Article très intéressant, merci. J'aurais juste ajouté dans la conclusion les traitements de sortie d'hiver comme un des outils pour gérer ces levées de vulpins qui s'étalent dans le temps. La résistance n'est pas généralisée, ne nous privons pas de ce levier là où cela fait encore sens.

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