Une campagne 2024/2025 marquée par une bonne acclimatation des céréales d’hiver aux extrêmes
La campagne céréales 2024/2025 restera dans les mémoires comme particulièrement marquée par des extrêmes climatiques, suscitant de nombreuses inquiétudes, mais se soldant finalement par un bilan post-récolte positif.
La période de semis s’est révélée particulièrement échelonnée, contrainte par des pluies régulières. Trois créneaux majeurs se distinguent sur la Lorraine (Source : BSV), avec :
- des premiers semis autour du 25 septembre,
- puis sur une fenêtre très restreinte les 5-6 octobre,
- et enfin, après le 15 octobre pour se conclure dans la majorité des situations début novembre, soit des dates de semis relativement tardives pour la région.
Ces semis, particulièrement ceux réalisés sur les deux premières périodes, ont souvent été affectés par les conditions d’implantations : tassement, mauvais enfouissement des graines, phytotoxicité liée au désherbage. Ces différents facteurs ont entrainé une levée assez longue, manquant de vigueur, atteignant ainsi le stade début tallage fin novembre (Source : BSV).
À noter que l’hydromorphie et/ou la forte pression de limaces ont pu entraîner localement des zones re-semées, ou des retournements de parcelles.
Les céréales à paille passent l’hiver sous des températures douces, favorables au tallage et au rattrapage des semis tardifs, sans gros épisodes de gel. Les faibles précipitations sur février/mars (cumul 50 mm localement) permettent d’assainir les sols hydromorphes gorgés en eau suite aux excès d’eau en janvier (sup. 1er quintile env. 110 mm).
Les pucerons se sont faits discrets avec une présence contenue dans les parcelles à l’automne et très peu de symptômes JNO (Jaunisse Nanisante de l'Orge) en sortie d’hiver.
À ce stade, le nombre de plantes/m² est plus faible que l’historique régionale, avec, cependant, un nombre de talles de plus de 3 feuilles (susceptibles de donner un épi) en tendance élevée (figure 1). La biomasse aérienne à épi 1 cm est dans la moyenne, avec néanmoins une forte variabilité (de 0,98 à 3,04 Tms/ha selon les sites).
Figure n° 1 : Nombre de talles en blé supérieur à 3F en fonction du nombre de plantes/m² - Observatoire ARVALIS
D’épi 1 cm à floraison
L’apparition du stade épi 1 cm se généralise au 2 avril, 2025 se place dans la tendance pluriannuelle.
La montaison des céréales se déroule dans des conditions climatiques parfois atypiques, avec des phénomènes climatiques pouvant différer selon les secteurs géographiques (ex. : épisode neigeux Moselle Est).
Nombreuses ont été les interrogations concernant la nutrition des plantes :
Alimentation en eau
L’absence de pluviométrie significative en février, mars, et la première décade d’avril, se fait ressentir rapidement dans les bilans hydriques malgré les fortes réserves hivernales, avec un passage dans la réserve de survie dès fin mars, même en sol profond (RU de 120 mm - figure 2). Pour autant, les plantes ont exprimé visuellement peu de symptômes de souffrance en poursuivant leur développement végétatif, sans doute grâce à des épisodes ponctuels de pluie très efficients et un flux transpiratoire réduit par les plantes (notion d’acclimatation).
Figure n° 2 : Bilan Hydrique ARVALIS / Météo France – Saint Hilaire en Woëvre (55)
Alimentation azotée
Malgré des développements racinaires qui ont pu être restreints (fortes pluviométries, mauvaises structures) et des apports d’azote qui n’ont pas toujours bénéficié d’une pluviométrie suffisante (apports de mars - Figure 3). Les indices de nutrition azotés se sont plutôt bien maintenus en cours de campagne avec des Nabs (quantité d'azote absorbé en kgN/ha) à floraison corrects.
Figure n° 3 : Cumul de Pluie dans les 15 jours suivant un apport d’azote – ARVALIS /Météo France
Le quotient photothermique, bien équilibré, proche du décile 8 (Figure 4), est favorable à une croissance régulière sur la montaison.
Figure n° 4 : Quotient phothermique montaison – ARVALIS/Météo France
Les températures élevées et l’absence de pluie ont eu pour conséquence une très nette accélération de la montaison, ainsi réduite et marquée par des épiaisons précoces.
D’un point de vue sanitaire, ces conditions ont également été défavorables au développement de maladies. L’année 2025 se qualifie comme très faible en termes de pression, avec environ 5 q/ha de nuisibilité traitée/non traitée. La pression adventices est relativement mieux gérée que les années précédentes, grâce aux dates de semis tardives.
Les biomasses à floraison suivent la tendance pluriannuelle, de l’ordre de 12 tMS/ha, traduisant peu de souffrance des plantes pendant la montaison. (Figure 5)
Figure n° 5 : Matière sèche aérienne à floraison - Observatoire ARVALIS
Si le nombre d’épis est la première composante du futur nombre de grains/m², il faut également prendre en compte la fertilité des épis qui se détermine tout au long de la montaison.
2025 aura été marquée par de bons rayonnements tout au long du cycle, et plus particulièrement entre 2 nœuds et floraison, qui ont permis une mise en place de la fertilité épi optimale (+5 % en orge d'hiver/ +10 % en blé tendre d'hiver), compensant un nombre d’épis/m² juste dans la moyenne, voir inférieur à la moyenne sur 10 ans aussi bien sur orge d’hiver qu'en blé (Figure 6).
Figure n° 6 : Nombre de grains/m² ORGE et BLE en fonction du nombre d’épis. Observatoire ARVALIS
De la floraison à la récolte
Le cycle des orges, plus précoce que les blés, permet d’éviter les coups de chaud et l’échaudage de fin de cycle. Une stratégie d’évitement d’autant plus utile cette année.
La première phase de remplissage a été très favorable, grâce à une activité photosynthétique optimale et une accumulation dans la plante, qui a pu être utile lors de la seconde phase de remplissage, par remobilisation de ses réserves.
Les trajectoires de remplissage des orges d’hiver déterminent la taille des enveloppes des grains et donc du PMG (Poids de mille grains). Dès le début du remplissage, les orges d’hiver affichent un potentiel de PMG élevé (+15 % par rapport à la moyenne sur 10 ans) (Figure 7).
Le blé sera, quant à lui, davantage impacté durant les stades grains laiteux à grains pâteux par plusieurs jours de températures échaudantes (13-14 juin 33°C / 21-22 juin 34°C max.). Un impact à moduler par les pluies d’orages selon les secteurs (Figure 8).
Figure n° 7 : Cinétique de remplissage des orges d’hiver- Observatoire ARVALIS
Figure n° 8 : Risque échaudage aux stades grain laiteux – grains pâteux – ARVALIS/Météo France
Les blés affichent de bons potentiels à mi-remplissage, pour autant la trajectoire initiale des PMG a pu être limitée par les jours échaudants. Les conséquences sur le PMG seront toutefois réduites grâce à des trajectoires initiales très correctes. (Figure 8).
Aussi bien sur orge que sur blé, les dernières composantes de rendements ont permis de compenser une densité épi dans la moyenne basse grâce à une fertilité épi supérieure à la moyenne (+10 %), et des PMG corrects. Il en résulte des rendements supérieurs à la moyenne pluriannuelle.
Figure n° 9 : Cinétique de remplissage des blés - Observatoire ARVALIS
Côté qualité, les calibrages et les poids spécifiques (PS) des orges d’hiver sont très bons, les teneurs en protéines sont légèrement inférieures à la moyenne mais correspondent au cahier des charges des collecteurs. Ces teneurs plus faibles s’expliquent par la dilution de l’azote par le rendement. Il en est de même pour le blé, avec toutefois des teneurs en protéines très correctes au regard des potentiels de rendements, laissant supposer une bonne remobilisation de l’azote des pailles vers le grain.
Les PS sont excellents. Pour ce qui est des rendements des pailles, à l’image des biomasses postfloraison, les andains étaient au rendez-vous.
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