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Maladies des céréales à paille - Un climat humide autour de la floraison favorise les fusarioses

A l'approche de la floraison des céréales, il est important d'évaluer le risque de contamination des épis par la fusariose pour intervenir si besoin. Cette maladie provoque une nécrose précoce d’un ou plusieurs épillets suivie le plus souvent d’un échaudage de l’épi. Certaines espèces de champignons sont capables de produire des mycotoxines comme le déoxynivalénol (DON) dont la teneur dans le grain est réglementée. Un climat humide à partir de l’épiaison et pendant la floraison favorise leur développement.

Le risque d’apparition des fusarioses sur les épis de céréales à paille résulte d’une combinaison de trois facteurs :

  • Une forte humidité ou des épisodes pluvieux autour du stade floraison. 40 mm de pluies à cette période augmentent considérablement le risque.
  • La présence sur le sol de résidus de culture contaminés.
  • La sensibilité des variétés aux fusarioses.

Il est donc primordial d’observer le climat à l’approche de la floraison pour évaluer au mieux le risque fusariose final. La période de floraison s'achève dans les régions les plus méridionales et devrait s’étaler jusqu’à début juin pour les régions les plus septentrionales. Pour des informations plus précises sur les stades actuels des blés, consultez le Bulletin de Santé du Végétal de votre région.

Deux genres et un complexe de différentes espèces

Figure 1 : Genres et principales espèces de fusarioses de l’épi rencontrées sur les céréales à paille.

Genres et principales espèces de fusarioses de l’épi rencontrées sur les céréales à paille

F. graminearum est l’espèce la plus problématique car elle est capable de produire des mycotoxines dont le déoxynivalénol (DON). F.culmorum peut aussi produire du DON mais sa présence est très secondaire en France.

Quels sont les symptômes de la fusariose sur les céréales à paille ?

Les fusarioses (dues à F.graminearum, F.culmorum, Microdochium majus et Microdochium nivale) provoquent  différents symptômes :

  • Les premiers symptômes de la maladie sur épi apparaissent généralement 2 à 3 semaines après le moment de la floraison. Ils se traduisent par une décoloration progressive d’un ou plusieurs épillets. A ce stade, écarter la glume et la glumelle permet de constater plus aisément la contamination de l’épillet, parfois associée à une auréole brune.
  • Les symptômes évoluent ensuite et s’étendent aux épillets voisins, voire à l’ensemble de l’épi lorsque le champignon envahit le système vasculaire de l’épi (cas de F. graminearum).
  • Le col de l’épi présente parfois un brunissement, correspondant à la progression descendante du champignon via le système vasculaire, de F. graminearum issu d’une contamination de l’épi. Microdochium spp. ne produit pas ce type de symptômes.
La fusariose des épis : symptômes et nuisibilité - ARVALIS-infos.fr

Les symptômes sur épi ne permettent pas d’identifier précisément l’espèce de fusariose responsable, tout au plus ils fournissent des indices. La présence de taches de Microdochium spp sur feuilles, est un bon indice de présence de la maladie sur épi sur épi.  Pour un diagnostic formel du champignon, une analyse microbiologique ou moléculaire est nécessaire.

Les pertes de rendement peuvent aller de 30 à 70 % selon la gravité des attaques. Elles sont à mettre en lien avec l'échaudage des grains issus des épis attaqués. D’autre part, une diminution de qualité boulangère des blés tendres est souvent constatée, tout comme de la moucheture sur blé dur. Enfin, F. graminearum et F. culmorum sont capables de produire des mycotoxines dans les grains, et plus particulièrement du déoxynivalénol (DON) toxique pour l’homme et le porc. La concentration de DON pour l’alimentation humaine ne doit pas dépasser la limite maximale réglementaire de 1250 µg/kg. Il est donc impératif de maîtriser le risque DON. A noter qu'en blé dur, cette limite maximale est portée à 1750 µg/kg.

Comment se débarrasser et minimiser le risque fusariose ?

Le principal facteur favorisant de la maladie de l'épi est le climat. Une forte humidité ou un temps pluvieux durant la période de floraison (+/- 7 jours) augmente sensiblement le risque. Pour cette raison, il convient de ne pas irriguer les blés pendant une durée de 8 jours après la sortie des étamines, sauf en cas d'ensoleillement important, limitant le taux d'humidité au niveau de l'épi. La nature du précédent et le type de travail du sol ont également une grande importance dans la maîtrise du risque d’infection par les fusarioses. Les systèmes en non-labour sont les plus exposés car ils laissent en surface des résidus potentiellement contaminés. Le risque est encore plus grand s’il s’agit de précédent maïs ou sorgho. Enfin, des variétés sensibles aux fusarioses seront naturellement plus affectées en cas d’attaques.

Aujourd’hui, aucune variété de céréales d’hiver n’est totalement résistante à Fusarium graminearum. Bien que le nombre de variétés peu sensibles augmente, il reste limité. De fait, c’est la combinaison des facteurs qui permet de limiter le risque : gestion des résidus du précédent, choix variétal, protection fongicide à la floraison.

ARVALIS – Institut du végétal propose depuis quelques années des grilles d’évaluation du risque DON à la parcelle selon les espèces de céréales, accompagnées d'échelles de sensibilités variétales.

Pour le blé tendre

Figure 2 : Grille d’évaluation sur blé tendre du risque d’accumulation du déoxynivalénol (DON) dans le grain et d’aide au traitement contre la fusariose sur épi (Fusarium graminearum)
Grille d’évaluation sur blé tendre du risque d’accumulation du déoxynivalénol (DON) dans le grain et d’aide au traitement contre la fusariose sur épi (Fusarium graminearum)

Recommandations associées à chaque niveau de risque :
►  1 et 2 : Le risque fusariose est minimum et présage d’une bonne qualité sanitaire du grain vis-à-vis de la teneur en DON. Pas de traitement spécifique vis-à-vis des fusarioses quelles que soient les conditions climatiques.

►  3 : Le risque peut être encore minimisé en choisissant une variété moins sensible. Traiter spécifiquement vis-à-vis des fusarioses en cas de climat humide (cumul de pluie > 40 mm pendant la période entourant la floraison).

►  4 et 5 : Il est préférable d’implanter une variété moins sensible ou de réaliser un labour pour revenir à un niveau de risque inférieur. A défaut, effectuer un broyage le plus fin possible et une incorporation des résidus rapidement après la récolte. Pour ces deux niveaux de risque, envisager un traitement spécifique vis-à-vis des fusarioses, sauf si le climat est très sec pendant la période de floraison (cumul de pluie < 10 mm pendant les +/- 7 jours entourant la floraison).

►  6 et 7 : Modifier le système de culture pour revenir à un niveau de risque inférieur. Labourer ou réaliser un broyage le plus fin possible des résidus de culture avec une incorporation rapidement après la récolte sont les solutions techniques les plus efficaces et qui doivent être considérées avant toute autre solution. Choisir une variété peu sensible à la fusariose. Traiter systématiquement.

Figure 3 : Classement des variétés de blé tendre selon leur résistance au risque DON (F. graminearum) – échelle 2020/2021
Classement des variétés de blé tendre selon leur résistance au risque DON (F. graminearum) – échelle 2020/2021

Pour le triticale

Figure 4 : Grille d’évaluation sur triticale du risque d’accumulation du déoxynivalénol (DON) dans le grain
Grille d’évaluation sur triticale du risque d’accumulation du déoxynivalénol (DON) dans le grain

Recommandations associées à chaque niveau de risque :
► 1 et 2 : Le risque fusariose est minimum et présage d’une excellente qualité sanitaire du grain vis-à-vis de la teneur en DON. Pas de traitement spécifique vis-à-vis des fusarioses quelles que soient les conditions climatiques.

► 3 : Le risque peut être encore minimisé en choisissant une variété moins sensible. Traiter spécifiquement vis-à-vis des fusarioses en cas de climat humide pendant la période entourant la floraison.

► 4 et 5 : Il est préférable de réaliser un labour pour revenir à un niveau de risque inférieur. Pour ces deux niveaux de risque, envisager un traitement avec un triazole anti-fusarium efficace, sauf si le climat est très sec pendant la période entourant la floraison.

► 6 et 7 : Modifier le système de culture pour revenir à un niveau de risque inférieur. Labourer est la solution technique la plus efficace et qui doit être considérée avant toute autre solution. Choisir une variété peu sensible à l’accumulation de DON. Traiter systématiquement avec un triazole anti-fusarium efficace.

Figure 5 : Classement des variétés de triticale selon leur résistance au risque DON (F. graminearum) - échelle 2020/2021
Classement des variétés de triticale selon leur résistance au risque DON (F. graminearum) - échelle 2020/2021

Pour le blé dur

Figure 6 : Grille d’évaluation sur blé dur du risque d'accumulation de déoxynivalénol (DON) dans le grain
Grille d’évaluation sur blé dur du risque d'accumulation de déoxynivalénol (DON) dans le grain

Recommandations
► Risque a : le risque est minimum et présage d’une bonne qualité sanitaire du grain vis-à-vis de la teneur en DON.

► Risques b et c : le risque peut être encore minimisé en choisissant une variété moins sensible ou en améliorant la finesse de broyage des résidus du précédent.

► Risques d, e et f : nous vous conseillons de modifier le système de culture pour revenir à un niveau de risque inférieur. Modifier votre rotation ou labourer sont les solutions techniques les plus efficaces et qui doivent être considérées avant toute autre. A défaut, réaliser un broyage complémentaire du broyage sous bec et une incorporation rapide des éléments fins après récolte.

Figure 7 : Classement des variétés de blé dur selon leur résistance au risque DON – Synthèse pluriannuelle nationale (2005-2020)
Classement des variétés de blé dur selon leur résistance au risque DON – Synthèse pluriannuelle nationale (2005-2020)

Des traitements fongicides partiellement efficaces contre la fusariose

Les traitements fongicides sont un ultime recours mais sont loin d’être totalement efficaces. Ils atteignent dans le meilleur des cas 60 à 70 % d’efficacité. Ces moyens de lutte doivent impérativement être réalisés préventivement (début floraison) avec des doses suffisantes (60 à 80 % de la dose homologuée minimum, selon le produit). Si des symptômes sont visibles, il est trop tard pour traiter.

Parmi les  substances actives les plus efficaces, le prothioconazole est la seule à présenter une grande polyvalence sur les principales espèces du complexe des fusarioses. Elle est généralement proposée sous le nom commercial de Prosaro (ou Piano), Kestrel (ou Onnel) ou Fandango S (Foster).

D’autres spécialités à base de tébuconazole, de bromuconazole ou de metconazole permettent également de lutter efficacement contre F. graminearum, mais présentent un intérêt plus limité sur les espèces du genre Microdochium, il est vrai moins fréquent. Enfin le prochloraze, le methylthiophanate et la dimoxystrobine, utilisés le plus souvent en mélange,  complètent la liste des molécules actives sur ces cibles.

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