Blé, orge, triticale : quelle stratégie de gestion des maladies après les pluies ?

Quelle stratégie adopter sur blé ?

En blé, deux grandes situations se dégagent en fonction de l’avancée des stades et des cumuls de pluie reçus. Le sud de la région, plus précoce, a été plus arrosé durant la montaison que le nord, favorisant d’autant plus la septoriose.

Dans la Drôme : intervenir rapidement sur variétés sensibles à la septoriose

La septoriose est plus présente dans la Drôme cette année qu’habituellement. Les variétés qui y sont cultivées sont souvent sensibles à cette maladie (car principalement choisies pour leur tolérance aux rouilles jaune et brune) : RGT Propulso, Filon, LG Acadie... Il s’agit en général de variétés précoces à ultra-précoces qui approchent du stade « dernière feuille étalée » voire l’ont déjà atteint.

Le seuil de risque septoriose pour les variétés sensibles a généralement été atteint dans la semaine du 15 avril, mais les parcelles étaient impraticables. Lorsque les parcelles seront à nouveau accessibles : prioriser l’intervention fongicide aux autres chantiers pour protéger les 3 dernières feuilles définitives qui assurent le remplissage de l’épi. Les pluies ont favorisé la contamination des étages foliaires supérieurs : intervenir sans tarder pour ne pas laisser la maladie s’installer.

La rouille brune étant la principale maladie sur blé tendre dans la Drôme, il ne faut pas oublier de la prendre en compte lors de l’intervention fongicide à dernière feuille étalée. Il s’agira alors d’intégrer une strobilurine (Comet, Quibilium, Amistar, Azoxystar…), même si elle est à ce jour très discrète.

A ce stade il est impossible de prédire la nuisibilité de la septoriose cette année. Si une météo sèche et chaude s’installe, elle pourrait être très limitée (comme habituellement sur le secteur), supplantée par la rouille brune. Mais un maintien de conditions pluvieuses sur la fin de cycle pourrait la favoriser.

Pour les variétés peu sensibles aux maladies foliaires comme RGT Letsgo, elles nécessitent également une protection à dernière feuille étalée mais avec plus de souplesse pour la réaliser.

Et pour le reste de la région ?

Sur la grande moitié nord de la région, le nombre de jours de pluie depuis le début de la montaison a été moins important et plus proche de la normale observée sur 20 ans (voir tableau 1). Les variétés qui y sont cultivées sont en majorité peu sensibles à assez résistantes à la septoriose. La pression septoriose observée y est à ce jour globalement faible. Les stades sont également moins avancés : la majorité des parcelles atteint la dernière feuille pointante, mais certaines sont encore à 2 nœuds.

Pour les variétés peu sensibles à assez résistantes à la septoriose (note ≥ 6,5, comme LG Absalon, LG Abilene, RGT Pacteo, Intensity, Izalco CS, Prestance), attendre que la dernière feuille soit complètement étalée pour réaliser l’intervention fongicide et protéger l’intégralité des feuilles définitives. Les références issues de nos expérimentations ne montrent pas de gain technico-économique à intervenir avec un fongicide avant dernière feuille étalée sur ces variétés tolérantes, sauf présence importante d’oïdium, qui nécessite un traitement spécifique, ou de rouille jaune, peu présente cette année. Il est trop tard pour intervenir contre le piétin-verse.

Pour les variétés sensibles à la septoriose (note < 6,5, comme KWS Ultim, LG Aikido, Unik, Apache), le seuil de risque est atteint pour les semis d’octobre, mais les pluies n’ont pas permis d’intervenir cette semaine. Deux situations se distinguent selon le stade des parcelles :

• Pour les parcelles à dernière feuille pointante : il est trop tôt pour déclencher le cœur de la protection fongicide (combinaison de SDHI, triazole voire strobilurine, souvent appelé T2), la dernière feuille encore enroulée ne serait pas protégée. Il convient toutefois de déclencher un T1 à base de soufre, de phosphonate de potassium + soufre ou de metconazole + soufre dans le but de contenir la progression de la maladie. L’intervention T2 devra ensuite être déclenchée à dernière feuille étalée pour protéger entièrement et plus durablement toutes les feuilles définitives (même si le délai entre les deux interventions est resserré).
• Pour les parcelles où la dernière feuille sera entièrement étalée lorsque l’accès aux parcelles sera possible : déclencher l’intervention T2.

Quelle stratégie adopter en orge ?

Plus en avance que les blés, la majorité des orges aura atteint le stade dernière feuille étalée / sortie des barbes lorsque les parcelles seront à nouveau praticables.

Déclencher la protection fongicide (T2) dès que possible sur ces parcelles, en l’adaptant à la sensibilité variétale.

Pour les parcelles moins avancées, un éventuel T1 (visant à contenir la maladie jusqu’à l’application du T2) est à raisonner au cas par cas selon la sensibilité variétale et la pression rhynchosporiose et helminthosporiose observées. Notons que l’expression de ces maladies reste pour l’instant limitée cette année. Pour les variétés sensibles à la rhynchosporiose qui exprimaient déjà des symptômes avant les pluies, l’épisode pluvieux a favorisé la contamination des étages foliaires supérieurs.

Dans tous les cas, attendre que la dernière feuille soit totalement étalée pour déclencher le cœur de la protection fongicide.

Attention, les taches physiologiques peuvent être sources d’importantes confusions avec l’helminthosporiose.

Lire aussi : « De nombreux symptômes physiologiques sur blés et orges »

Quelle stratégie adopter sur triticale ?

La rhynchosporiose s’exprime de plus en plus fréquemment sur le triticale depuis plusieurs années. Cette année, elle est régulièrement présente en Rhône-Alpes.

Les facteurs de risque sont la culture d’une variété sensible ainsi que de fortes pluies courant montaison. Les pluies récentes sont favorables à son développement.

Le seuil de risque se détermine en comptant ensemble les symptômes de rhynchosporiose et éventuellement de septoriose : 20 % des F4 définitives contaminées pour les variétés sensibles et 50 % des F4 définitives contaminées pour les variétés résistantes.

La feuille à observer (correspondant à la F4 définitive) est la F3 à dernière feuille pointante et la F2 à 2 nœuds.

L’absence de T1 est la norme sur triticale dans la région, et la majorité des parcelles ne justifient pas d’intervention à ce jour. Mais certaines variétés sensibles présentent des symptômes de rhynchosporiose non négligeables et sont peu avancées en stade (2 nœuds à dernière feuille pointante). Sur ces parcelles, une intervention peut se justifier. Pour les parcelles très proches de la dernière feuille étalée, attendre que la dernière feuille soit bien étalée pour protéger l’ensemble du feuillage définitif.

Dans les rares cas où un T1 est nécessaire, privilégier une intervention à base de metconazole (Juventus, Caramba Star, Metcostar 90) à 0,6 l/ha pour un investissement d’environ 20 €/ha. Puis déclencher le T2 à dernière feuille étalée comme prévu