Résultats d’essais

Légumineuses fourragères - Luzerne : assurer une bonne implantation grâce au chaulage

Le bon développement des légumineuses, comme la luzerne, dépend du pH du sol. Celui-ci doit être supérieur à 6 pour une bonne implantation de la culture. Quelles sont les conditions optimales d’amendement du sol par chaulage pour assurer la pérennité de la prairie ?

Le chaulage, un préalable à toute implantation de prairies

L’acidification des sols, processus naturel et inévitable, est notamment influencée par le type de sol, le climat, l’activité biologique et les pratiques culturales. Le pH influe sur la disponibilité des éléments dans le sol.

Au-dessous d’un pHeau de 5,5, la principale contrainte de production est la toxicité aluminique, qui affecte la nutrition minérale des plantes et pénalise la productivité des cultures.

Des pH proches de 6 suffisent à répondre aux exigences de la plupart des cultures (graminées prairiales, céréales à paille, maïs). Bien que la luzerne puisse germer à des pHeau inférieurs à 6, sa croissance juvénile est toutefois fortement perturbée, et la mise en place des nodosités de Rhizobium meliloti, fixatrices d’azote, est faible, voire nulle. Or, c’est la condition sine qua non de l’autonomie de la plante vis-à-vis de son alimentation azotée. Un pHeau supérieur à 6 favorisera l’implantation, la productivité et la pérennité de la luzerne.

Un essai récent confirme le pHeau seuil de 6 pour l’implantation de la luzerne

Dans le cadre du programme SOS Protein, ARVALIS a conduit un essai sur la station expérimentale de La Jaillière (44) visant à mesurer l’effet de l’apport d'un produit de chaulage, fin ou grossier, sur la productivité de la luzerne durant les deux premières années. La modalité témoin n’a reçu aucun apport. Les autres modalités ont reçu avant l’implantation 1 000 ou 2 000 unités de carbonates (CaO) sous forme broyée ou pulvérisée, afin de distinguer les effets « dose » et « vitesse d'action » de l’apport. Le pHeau du sol était de 6,1 juste avant l’apport des produits de chaulage, enfouis sur 15 cm de profondeur. La productivité a été évaluée sur les 4 cycles de la luzerne durant la campagne 2015, et sur 3 cycles seulement durant la campagne 2016, le fort déficit hydrique de fin d’été ayant empêché le redémarrage au 4e cycle.

Le chaulage a un effet positif sur le rendement. À l’issue des deux campagnes de récolte, le rendement cumulé s’établit à 18,4 tonnes de matière sèche (MS) par hectare pour le témoin non chaulé, alors qu'il varie de 21,5 à 24,2 t MS/ha pour les modalités chaulées. Pour une même dose de CaO apportée, l’effet de la forme (broyée ou pulvérisée) sur le rendement n'est pas significatif. Néanmoins, à l’automne 2015, soit 14 mois après l’apport, le pHeau du sol est significativement différent : passant de 6,1 à 5,7 dans le témoin non chaulé, et compris entre 6,4 et 7,2 pour les modalités chaulées.

Figure 1 : Rendement cumulé sur 2 ans de la luzerne, et contribution de chaque coupe, pour différentes pratiques de chaulage - Moyennes ajustées - Comparaison de moyennes au seuil de 5 % - Essais « CaO » 2014-2016 d’ARVALIS, Station La Jaillière (44), programme SOS Protein

Des lettres différentes correspondent à des groupes de significativité différents.

L’implantation des légumineuses doit être anticipée afin d’ajuster le statut chimique du sol (pH, P, K, Ca, Mg…). 

Dans le cas des sols très acides (pHeau ≤ 5), la dose permettant de remonter le pHeau au-dessus de 6 peut être élevée. Par exemple, 2800 kg CaO/ha sont nécessaires pour augmenter le pHeau de 5 à 6 dans un sol à CECMetson de 10. Si cette dose est fractionnée en 2 apports successifs, le premier doit être conséquent pour faire remonter, dès la première année, le pH au-dessus de 5,5, voire 5,8, et ainsi lever la toxicité aluminique.

Quelle quantité apporter, sous quelle forme ?

Le tableau 1 détaille la quantité de valeur neutralisante (VN) par hectare nécessaire pour rehausser le pHeau du sol de 0,5 point en fonction de sa CEC. La quantité d’amendement correspondante est calculée en fonction de la teneur en valeur neutralisante du produit inscrite sur l’étiquette. Par exemple, pour apporter 1 000 unités de VN avec un amendement calcaire cru dont la valeur neutralisante est de 55, il faudra épandre 1 820 kg (1 000/0,55) de ce produit par hectare.

Tableau 1 : Quantités d’unités neutralisantes nécessaires pour augmenter le pHeau de 0,5 unité sur la couche labourée (0-25 cm) en fonction de la CEC Metson et pour un pHeau initial compris entre 5 et 6 - Valeurs moyennes obtenues à partir d’expérimentations réalisées en France

Il existe plusieurs types d’amendement basiques. Les produits crus (calcaires…) se distinguent par leur finesse de mouture, du plus grossier (calcaire concassé) au plus fin (calcaire pulvérisé). Combinée à la dureté du carbonate, cette finesse de mouture détermine la vitesse de dissolution de l’amendement, et donc sa vitesse d’action de neutralisation de l’acidité : plus un produit est fin, plus il agit rapidement.

En raison de leur coût plus important, les amendements basiques à action rapide seront choisis lorsque le redressement est urgent, c’est-à-dire pour un pH inférieur à 5,5 et quand le délai entre l’application et l’implantation de la culture est inférieur à 1 mois. Dans les autres situations avec travail du sol, l’utilisation d’amendements à vitesse d’action moyenne à lente est à privilégier.

Il faut ensuite tenir compte de la culture. Les légumineuses sont des espèces réputées plus acidifiantes en raison de leur mode d’alimentation azotée, principalement par fixation symbiotique de l’azote de l’air. Selon la situation pédoclimatique, 150 à 350 kg de CaO/ha/an doivent être apportés pour contenir l’acidification et répondre aux besoins des légumineuses.

Contrairement aux idées reçues, les effluents d’élevage, et notamment les fumiers et composts, ont tendance à accroître le pH. Dans les situations bénéficiant régulièrement d’apports de matière organique, l’apport de chaux pourra être revu à la baisse.

La manière la plus sûre d’ajuster les apports reste de procéder à une analyse de sol régulière (tous les 5 ans pour le pH) sur l’horizon travaillé et, si possible, toujours à la même période de l’année car le pH varie au cours de la saison.

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