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Pays de la Loire

Céréales : raisonner le premier apport azoté en fonction de la date de semis

Les pluies intenses et régulières observées depuis septembre dernier ont compliqué les récoltes des cultures de printemps, et par effet de ricochet, ont entraîné un retard important des semis cet automne ; elles ont, de plus, provoqué la migration de l’azote minéral dans les horizons profonds du sol et des pertes par lixiviation. Les quelques semis précoces de la première quinzaine d’octobre pourront se passer d’un apport au tallage. En revanche, pour la majorité des semis, réalisée la première quinzaine de novembre, il sera nécessaire d’accompagner l’alimentation azotée dès le tallage ; sous réserve de portance ! Le point sur la conduite à tenir selon ces situations disparates.

blé au stade tallage

Les pluies abondantes et le faible développement des cultures limitent l’azote minéral du sol valorisable

Les cumuls de pluie depuis septembre, nettement excédentaires par rapport à la médiane sur vingt ans ont provoqué le lessivage de l’azote minéralisé au cours des derniers mois. Ce phénomène est d’autant plus marqué sur les semis tardifs (novembre – décembre), dont le développement actuel est limité avec, à ce stade, de faibles besoins en minéraux et une faible capacité à absorber l’azote du sol. En conséquence, une partie de l’azote minéralisé en novembre-décembre a migré en profondeur et n’est actuellement pas accessible aux racines. Par ailleurs, l’excès d’eau prolongé dans les parcelles limite le processus de minéralisation de l’azote.

Carte 1 : Cumuls de pluie entre le 01/09/24 et le 25/01/25 (mm)
Carte 1 : Cumuls de pluie entre le 01/09/24 et le 25/01/25 (mm)
Source des données : Météo-France - ARVALIS

A l’échelle de la région des Pays de la Loire, la pluviométrie depuis début septembre excède fréquemment les 400 mm.

Selon la date à laquelle les semis ont été réalisés, et selon le type de sol, les pertes d’azote par lessivage sont plus élevées que la normale. Par ailleurs, le processus de minéralisation de l’azote organique du sol est ralenti du fait de l’excès d’eau (anoxie qui pénalise les réactions microbiennes). En conséquence, le niveau des reliquats d’azote minéral du sol attendu est bas (de l’ordre de 25-35
 kg N/ha sur trois horizons).

Figure 1 : Situation modélisée d’une parcelle de blé tendre  (KWS Perceptium) semée le 7 novembre 2024 – site de la Jaillière – alluvions sablo argileuses caillouteuses, drainé – précédent maïs
Figure 1 : Situation modélisée d’une parcelle de blé tendre  (KWS Perceptium) semée le 7 novembre 2024 – site de la Jaillière – alluvions sablo argileuses caillouteuses, drainé – précédent maïs

Sur le site de La Jaillière (44), la saison de drainage a démarré très tôt, dès début octobre.

Les cumuls drainés atteints fin janvier sont de l’ordre de 150
 mm. L’azote a migré dans les horizons profonds du sol et n’est actuellement pas accessible aux racines des jeunes plantes, une partie est perdue par lixiviation (de l’ordre de 30 kg N/ha dans ce sol de limon moyennement profond).

Des situations contrastées selon de la date de semis, une stratégie de fertilisation à adapter

Accompagner les semis tardifs dès le tallage

Les parcelles semées « tard » (semis à partir de début novembre), sont entre 2 feuilles et début tallage. Leurs besoins en minéraux sont actuellement peu importants, il n’y a donc pas urgence à intervenir, d’autant plus que les parcelles sont loin d’être ressuyées.

Toutefois, du fait de leur faible enracinement, ces cultures n’ont pas capacité à absorber l’azote minéralisé cet automne qui a migré dans les horizons profonds du sol. Elles auront besoin d’un apport d’azote au tallage courant février, en particulier dans les sols sensibles à l’excès d’eau.

Figure 2 : Modélisation de la répartition de l’azote minéral du sol et de l’enracinement d’une culture de blé tendre semée le 07/11, site de la Jaillière, sol d’alluvions sablo limono argileuses drainé, précédent maïs fourrage (modèle CHN ARVALIS)
Figure 2 : Modélisation de la répartition de l’azote minéral du sol et de l’enracinement d’une culture de blé tendre semée le 07/11, site de la Jaillière, sol d’alluvions sablo limono argileuses drainé, précédent maïs fourrage (modèle CHN ARVALIS)

Les semis de début octobre sont, quant à eux, déjà bien alimentés en azote : attendre le redressement pour fertiliser

Les quelques parcelles semées début octobre présentent une croissance satisfaisante et ont capacité à absorber l’azote du sol au fur et à mesure de sa minéralisation. Dans ces situations, le premier apport d’azote est à programmer pour fin février – début mars, à l’approche du stade épi 1 cm. Dans ces parcelles, la priorité va au rattrapage du désherbage, souvent plus compliqué à maîtriser du fait de la date de semis précoce. Un apport d’engrais prématuré ne ferait que favoriser les adventices au détriment de la culture.

Figure 3 : Modélisation de la répartition de l’azote minéral du sol et de l’enracinement d’une culture de blé tendre semée le 05/10, site de la Jaillière, sol de limon sur schiste tendre précédent colza (modèle CHN ARVALIS)
Figure 3 : Modélisation de la répartition de l’azote minéral du sol et de l’enracinement d’une culture de blé tendre semée le 05/10, site de la Jaillière, sol de limon sur schiste tendre précédent colza (modèle CHN ARVALIS)
Recommandations pour optimiser les apports d’engrais
>> Attendre le ressuyage des parcelles pour limiter pertes d’engrais et tassement du sol : rappelons que la culture n’absorbe rien tant que le sol est asphyxié.
>> La forme d’engrais (ammonitrate, urée, solution) n’entraîne pas de retard dans la valorisation de l’engrais : pas besoin d’anticiper la date d’apport selon la forme.
>> Surveiller le salissement et priorité au désherbage : les adventices détournent l’engrais apporté au détriment de la culture.
>> Le phosphore (P) n’est pas nécessaire en sol bien pourvu : nos essais d’apport d’engrais P réalisés sur cultures pénalisées par l’excès d’eau montrent que celles-ci ne répondent pas à la fertilisation P « de circonstance » sauf si le sol est pauvre en P.
>> Attendre la toute fin tallage ou le stade épi 1 cm pour apporter du soufre, si nécessaire – nous aurons l’occasion d’en reparler dans un prochain message.

Message rédigé par ARVALIS en concertation avec Agrial, la CAVAC, Eureden, la coopérative d’Herbauges, les établissements Hautbois, Soufflet Agriculture

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