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Bourgogne-Franche-Comté

Flambée du prix des engrais : quel impact sur le raisonnement de la dose totale d’azote ?

Depuis septembre 2021, le cours des engrais azotés subit une augmentation significative, notamment à cause de la hausse des prix du gaz. Ce contexte économique particulier incite à optimiser encore plus la stratégie de fertilisation à mettre en œuvre sur les céréales à paille.

Gérer les apports d’azote 2022 en bourgogne et Franche-Comté

L’ammonitrate, dont le prix moyen ramené au kilogramme d’azote s’établissait à 0,95 € sur les cinq dernières années, a vu son prix doubler. L’urée et la solution azotée subissent une hausse des prix similaire, voire encore plus importante.

Cette envolée s’explique en majeure partie par l’explosion des prix du gaz naturel, nécessaire pour la production d’ammoniac, à la base de la production des engrais azotés. Cette tension sur les marchés peut entraîner de fortes incertitudes d’approvisionnement, avec des retards de livraisons (fabrication usine + problèmes de transport).

Avec cette disponibilité en engrais tendue, on peut légitimement s’interroger sur le niveau ou réajustement de la dose totale d’azote à apporter.

À partir de l’analyse de plus de 600 essais historiques comportant des courbes de réponse à l’azote, ARVALIS a créé une matrice illustrant les variations d’écart de dose d’azote à apporter en fonction de deux variables : le prix de l’azote et celui du blé (tableau 1).

Tableau 1 : Ecart de dose optimale en fonction du prix du blé et de l’azote
Ecart de dose optimale en fonction du prix du blé et de l’azote

En règle générale, les conditions économiques ont peu d’impact sur le niveau de la dose totale d’azote, comme illustré dans la zone blanche du tableau. Par exemple, on reste dans cette zone avec une plage de prix du blé allant de 200 à 230 €/t et un prix de l’azote de 1,40 à 1,50 €/kg (voir cercle rouge). En revanche, pour un prix d’achat des engrais de l’ordre de 1,95 €/kg, et avec un prix du blé négocié à 230 €/t, il faudrait alors réduire la dose d’azote totale d’environ 20 kg N/ha par rapport à l’optimum technique. Afin de juger rapidement de l’intérêt ou non à réduire la dose d’azote, on peut s’appuyer sur un indicateur simple : le ratio prix du blé sur prix de l’azote (exprimé en €/t de blé sur des € pour 100 kg d’azote). Au-dessus d’une valeur de 1,2 pour ce ratio, on ne remet pas en cause le niveau de la dose totale d’azote. Chaque agriculteur doit donc s’adapter en fonction de sa situation personnelle.

Cependant, il faut garder en tête que la réduction de la dose totale peut engendrer une baisse du rendement et de la teneur en protéines.

Si on reprend l’exemple précédent, avec une baisse de 20 kg N/ha de la dose totale, on perd en moyenne sur blé 1,5 q/ha et 0,3 point de protéines. De plus, l’impact de la réduction de la dose totale sur le taux de protéines peut être atténué par une meilleure répartition des doses par apport. En particulier, il faudra toujours privilégier les apports tardifs en cours de montaison (2 nœuds pour à dernière feuille) pour maintenir des taux de protéines satisfaisant les débouchés.

La stratégie de fertilisation azotée est fondée, pour le calcul de la dose d’azote totale a priori, sur la méthode du bilan. Dans ce contexte économique inédit, une mesure devient plus que jamais importante : celle du reliquat sortie d’hiver (RSH). Elle permet en effet d’estimer la quantité d’azote minéral contenue dans le sol disponible pour les cultures et de calculer au plus juste la dose d’engrais totale prévisionnelle. Cette mesure doit être réalisée aussi bien sur blé tendre que sur orges d’hiver et de printemps.

Focus sur le Reliquat Sortie Hiver

La valeur du RSH est variable d’une parcelle à l’autre et d’une année à l’autre. Ainsi, il serait opportun de réaliser autant de mesures que l’on a de situations agronomiques différentes sur son exploitation. Cette mesure résulte du reliquat présent à la récolte du précédent, de la minéralisation ou de l’organisation pendant l’automne (humus, résidus de culture, couvert, effluent) et de la lixiviation éventuelle par le drainage hivernal. À Dijon (figure 1), depuis le 10 octobre, les cumuls de pluies et de températures sont au niveau de la normale, relativement aux 20 dernières années. Rien ne permet donc de dire actuellement si les valeurs de RSH s’éloigneront d’une valeur à la moyenne. Seuls les premiers retours d’analyses de reliquats, à réaliser sur toute la profondeur d’enracinement, nous donneront des estimations fiables du niveau de l’année.

Figure 1 : Position de l’année 2022 en cumul pluies et température moyenne – Station de Dijon (21)
Position de l’année 2022 en cumul pluies et température moyenne – Station de Dijon (21)

Une fois le niveau de la dose totale a priori défini, il faudra veiller par la suite à bien valoriser tous les apports, sujets que nous aborderons dans de prochains messages.

Article rédigé par les partenaires de « Blé Orge Objectifs Protéines » (BOOP) Bourgogne-Franche-Comté :
PASCAL Eléonore et PELCE Luc (ARVALIS), BLAS Jérémie (CA21), BONNIN Emmanuel (Soufflet Agriculture), BOUCHIE Jean-Michel (Axereal), BOULLY Christine (Bourgogne du Sud), CHOPARD Patrick (CA39), COURBET Emeric (CA70), DERELLE Damien (SeineYonne), FLAMAND Romain (SAS Bresson), GUITTARD Jean-Michel (Terre Comtoise), KOEHL Philippe (Interval), LACHAUD Dominique (SAS Ruzé), LAMBARE Camille (CRA BFC), LOISEAU Marie-Agnès (CA89), MIMEAU MICKAËL (Dijon Céréales), SCHNOEBELEN Franck (CA25-90), VILLARD Antoine (CA71) et ZAMBOTTO Cédric (CA58)

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