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Normandie

Fertilisation des céréales à paille : s’adapter à la diversité des situations

Dates de semis étales, implantations difficiles, enracinements pénalisés… les conséquences des excès d’eau de ces trois derniers mois sur la région sont nombreuses. La gestion du premier apport d’azote sur les céréales nécessite de s’ajuster à la grande diversité de ces situations.

Estimation d'azote en sortie d'hiver 2024 en Normandie

Des reliquats sortie hiver plus faibles sont à attendre à cause des précipitations

La pluviométrie historiquement élevée de cet hiver a pu entraîner l’azote minéralisé en novembre -décembre dans les horizons profonds du sol. Cet azote minéral, s’il est lixivié ou que le système racinaire des cultures n’est pas assez développé, ne sera plus accessible et valorisé par les cultures.

Carte 1 : Cumul de pluie (en mm) en Normandie du 1er octobre 2023 au 1er février 2024

Carte 1 : Cumul de pluie (en mm) en Normandie du 1er octobre 2023 au 1er février 2024

Il est fortement recommandé de réaliser une mesure de reliquats pour ajuster la dose totale.

Attention : on peut s’attendre également à des niveaux de NH4+ plus élevés qu’à l’accoutumée (liés à la compaction ou la saturation en eau du sol qui limite l’activité des bactéries nitrifiantes).

Dans ces situations, le calcul du reliquat doit être le suivant :
Re = [NO3-] + [NH4+] de l’horizon 1 + [NO3-] + [1/3 x NH4+] de l’horizon 2 + [NO3-] de l’horizon 3

Quelle conduite tenir pour le premier apport d’azote ?

Priorité au désherbage !

Comme tous les ans, il est impératif de donner la priorité au désherbage et non aux apports d’azote pour éviter de « fertiliser » les adventices.

Prévoir un apport au tallage cette année 

Dans le contexte de l’année, un apport au tallage est justifié dans la majorité des situations. Vu l’échelonnement des semis, l’important est de bien raisonner en stade des cultures et pas en dates calendaires. Pour les semis d’octobre – novembre, on peut envisager un apport autour du 20 février.

Ne pas gonfler la dose de l’apport tallage

Inutile de majorer la dose au motif que la culture est mal implantée. Avant le stade épi 1 cm, la céréale a de faibles besoins en azote. 30 à 40 kg d’azote/ha en cours de tallage suffisent. Avec en plus certaines parcelles mal enracinées, il est préférable d’accompagner les cultures par des apports fractionnés réguliers (trois à quatre passages) afin de de pouvoir ajuster la fertilisation selon l’amélioration ou la dégradation de la situation.

Passer sur des sols ressuyés 

Il est inutile de passer « en force » pour apporter de l’engrais : en sol saturé d’eau, les racines sont asphyxiées et n’absorbent pas les nutriments. On a tout à perdre à intervenir dans ces conditions : tassement des sols, perte de l’engrais.

Et pour la suite ?

Réajuster la dose X ?

Il est difficile de se prononcer dès à présent sur l’impact des excès d’eau sur le rendement des céréales à paille semées cet autonome. Selon les conditions climatiques à venir ce printemps, les parcelles pourront ou non « rattraper » leur retard (manque de pieds/talles/enracinement...). En revanche, pour les cas des semis très tardifs (décembre, janvier), on peut déjà prévoir une diminution du potentiel de rendement. Dans ces situations, il est nécessaire de tenir compte de ce potentiel amoindri dans le calcul de la dose X du bilan d’azote prévisionnel en le minorant de 10 à 20 %, voire davantage selon la gravité de la situation et/ou du retard de la date de semis.

Fractionner et piloter le dernier apport 

Pour maximiser l’efficacité de l’engrais apporté, il est essentiel de ne pas tout solder à épi 1 cm et de réserver une partie de l’engrais pour la fin montaison. Le pilotage de la nutrition est d’autant plus stratégique cette année car il permettra d’accompagner au mieux la diversité des situations rencontrées et de réajuster les apports prévus au plus près des besoins des cultures. C’est dans ces situations atypiques que le recours aux outils de pilotage est le plus payant !

Un apport de phosphore pour améliorer la situation ?

Les apports de phosphore en sortie d’hiver pour rattraper un mauvais enracinement ne sont pas recommandés : nos essais historiques montrent une réponse des céréales à ces apports uniquement dans les situations où les teneurs du sol sont faibles et, dans ces situations, la réponse est moindre que pour des apports réalisés au semis.

Vigilance sur le soufre

Le soufre, tout comme l’azote, risque d’être lixivié. Cette année, les situations exposées à une carence seront plus nombreuses.

Tableau  1 : Grille pour évaluer la dose de soufre nécessaire sur blé tendre (en kg de SO3/ha) – ARVALIS

Objectif de rendement : 70 q/ha – 100 q/ha
Valeurs sans parenthèses : Sans apports réguliers de PRO
Valeurs entre parenthèses : Avec apports réguliers de fumiers et composts (> 1 an sur 3)

Tableau  1 : Grille pour évaluer la dose de soufre nécessaire sur blé tendre (en kg de SO3/ha) – ARVALIS

L'apport de soufre sera réalisé de préférence autour du stade épi 1 cm – éviter un apport au tallage.

En résumé :
- Forte hétérogénéité à attendre à la fois entre parcelles et au sein d’une même parcelle.
- Enracinement sans doute limitant dans les zones ennoyées ou saturées en eau avec de mauvais CAU -> adapter le fractionnement.
- Reliquats sortie hiver probablement faibles -> adapter la dose X.
- Des situations où des apports de soufre seront à prévoir.
- Le pilotage de la fertilisation azotée en fin de cycle sera essentiel pour s’adapter à chaque situation.

Message rédigé par ARVALIS en concertation avec NatUp et Sevépi

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