Résultats d’essais

Désherbage du blé dur : en premier lieu, mobiliser les leviers agronomiques

Les adventices ont profité de votre routine de désherbage pour s’installer durablement dans vos parcelles ? C’est le moment de casser cette routine et de mobiliser les leviers agronomiques à votre disposition pour perturber les cycles biologiques des adventices problématiques !

Déchaumeurs à disques

Les herbicides seuls ne peuvent répondre à une gestion durable des adventices. C’est la mise en œuvre d’un ou plusieurs leviers agronomiques avant même l’implantation du blé dur qui permettra d’optimiser l’efficacité des herbicides utilisés.

En effet, combiner l’agronomie à l’usage de solutions chimiques permet d’optimiser le désherbage en limitant le nombre d’adventices qui lèveront dans la culture et donc en mettant ces solutions dans de meilleures conditions. Cet objectif est d’autant plus important en blé dur où les solutions herbicides sont limitées, en lien avec des problèmes de sélectivité.

N’attendez pas d’avoir des infestations élevées avant de réagir ! Il sera plus difficile dans ce cas de revenir à des situations maîtrisées. Mettez toutes les chances de votre côté dès aujourd’hui en mobilisant les leviers agronomiques les plus adaptés au contexte pédoclimatique de chacune de vos parcelles et du matériel à votre disposition.

De la moisson du précédent à la récolte du blé dur, en passant par la rotation et le travail du sol, les solutions agronomiques sont diverses.

Evaluer l’état d’enherbement des parcelles en fin de campagne

Pour commencer et avant toute action, il est indispensable d’observer et de noter en fin de campagne quelle est la flore dominante présente dans chaque parcelle. Chaque adventice ayant ses spécificités, cela permettra d’adopter un plan d’action adapté et d’évaluer sa pertinence dans le temps. L’enjeu est particulièrement important vis-à-vis des graminées adventices pour lesquelles le niveau de risque est principalement lié à la quantité de plantes montées à graines au cours des 2 ou 3 années précédentes.

A la récolte : ne pas disséminer les graines d’adventices

Nettoyer sa moissonneuse-batteuse après la récolte de parcelles infestées est un moyen simple pour éviter de disséminer des graines d’adventices sur de nouvelles parcelles. Si possible, il est également préférable de les récolter en fin de moisson pour éviter au maximum des contaminations entre parcelles.

Des solutions encore peu mises en œuvre à ce jour permettent d’éliminer les graines des adventices récoltées par la moissonneuse-batteuse pour éviter leur retour sur la parcelle (récupérateur ou broyeur de menues-pailles). Ces solutions ne sont logiquement pas possibles sur les adventices présentes sous la barre de coupe ou ayant grainé avant récolte. Des essais ont mis en évidence des résultats intéressants sur certaines graminées à problème telles que le ray-grass. Néanmoins, le coût d’investissement du matériel reste important et limite son développement.

Une rotation diversifiée pour limiter la pression

La rotation des cultures est le premier outil de lutte contre les adventices.

En effet, la diversification et l’allongement des rotations évitent la spécialisation de la flore et facilitent le désherbage pour deux raisons :

  • il est plus facile de gérer une diversité d’adventices qu’une densité très importante d’une seule espèce ;
  • en alternant les cultures, l’agriculteur dispose de solutions agronomiques et chimiques à modes d’action différents, limitant ainsi l’apparition et le développement d’individus résistants résistants (l’évolution de la réglementation limite la diversité des modes d’action).

Le choix d’une rotation diversifiée doit tenir compte des contraintes techniques (type de sol, région, possibilité d’irrigation...) et économiques (temps de travail, débouchés locaux...).

L’insertion d’une nouvelle culture reste souvent délicate à mettre en place, car cela touche aux systèmes de cultures et à l’économie de l’exploitation.

Retarder la date de semis pour diminuer la pression adventice

En céréales à paille, un décalage de la date de semis de 2 à 3 semaines permet de limiter les levées des graminées automnales dans la culture.

Ainsi, sur les parcelles avec des problèmes d’infestation, il vaut mieux décaler le semis de quelques jours si cela est possible, c’est-à-dire en absence de contraintes notamment climatiques.

Cette technique peut être couplée à un ou plusieurs faux-semis afin de déstocker le stock semencier. Au-delà d’un décalage de 15 jours, il faut bien évaluer le bénéfice par rapport aux risques (conditions d’implantations plus difficiles, perte de potentiel...).

Dans des essais réalisés par ARVALIS, les dates décalées permettent des baisses nettes de densités d’adventices dans les témoins non traités.

A noter que malgré des baisses de potentiel, dans certaines situations avec des infestations problématiques, le décalage de la date de semis s’avère très souvent positif économiquement : la nuisibilité infligée par les adventices en semis précoce reste supérieure à la baisse de potentiel liée au décalage de date de semis. Attention, ce n’est pas le cas dans le sud de la France. De plus, les efficacités des herbicides sont facilitées sur des densités plus faibles.

Figure 1 : Réduction des populations de ray-grass et de vulpins lors d’un décalage entre deux dates de semis (19 essais blé tendre + orge d’hiver 2016 à 2020)
Réduction des populations de ray-grass et de vulpins lors d’un décalage entre deux dates de semis (19 essais Blé tendre + Orge d’hiver 2016 à 2020)

Labour et faux-semis, deux solutions de travail du sol disponibles

Le labour occasionnel peut être une des solutions pour gérer à long terme la pression adventices des parcelles, notamment les graminées. Les semences d’adventices germent principalement dans les premiers centimètres du sol. Font exception, fumeterre, gaillet, renouée liseron, véroniques ; qui peuvent germer vers 10 cm et la folle avoine qui peut germer jusqu’à 20 cm.

Enfouies en profondeur par un labour, certaines graines de graminées ont une durée de vie courte et perdent leur pouvoir germinatif au bout de 1, 2 ou 3 ans. Afin de ne pas remonter des semences encore viables, le labour doit être pratiqué de façon intermittente en fonction du taux annuel de décroissance (TAD) de l’adventice que l’on cherche à détruire. Un labour intermittent (tous les 3-4 ans) est très efficace sur les vulpins, ray-grass, bromes, ainsi que sur la plupart des adventices ayant un TAD élevé (figure 2). Le TAD correspond au pourcentage de graines d’adventices qui perdent leur aptitude à germer au bout d’un an.

Le labour est notamment à positionner à la suite d’un échec de désherbage de graminées. Les semences d’adventices produites seront ainsi enfouies en profondeur et ne pourront pas germer lors de la campagne suivante.

Figure 2 : Pourcentage de graines d’adventices qui perdent leur aptitude à germer au bout d’un an en fonction des espèces
pourcentage de graines d’adventices qui perdent leur aptitude à germer au bout d’un an en fonction des espèces

Des faux-semis courant de l’été ou avant semis pour réduire la pression adventice en début de campagne

Le labour peut présenter certaines limites : coût élevé, débit de chantier, difficultés techniques (milieux, type de sol…). Quand le retour au labour n’est pas possible ou non souhaité, les déstockages en été ou via des faux-semis, bien que moins efficaces, peuvent représenter une alternative intéressante.

Le déstockage pendant l’été est plus aléatoire en matière de levée que les faux-semis d’automne. En effet, les conditions climatiques ne sont pas forcément favorables aux levées et il ne s’agit pas des périodes préférentielles de levées de nombreuses adventices.

Pour qu’un faux-semis soit correctement réalisé, il faut assurer une préparation du sol fine, superficielle et rappuyée en surface. Il s’agit d’établir un bon contact terre-graine favorisant la levée des adventices et de garder l’humidité du sol. En fin d’été - début d’automne, son efficacité est conditionnée par une humidité du sol suffisante après l’intervention pour faire lever les graines.

Tableau 1 : Efficacité de différents outils pour réaliser un faux-semis
efficacité de différents outils pour réaliser un faux-semis

Toutefois, la technique ne fonctionne que sur des adventices en mesure de germer à ce moment-là. En effet, le niveau de dormance des graines d’adventices va déterminer l’échelonnement des levées. Il varie selon les espèces : le brome stérile non dormant germe très facilement en été/automne ; le faux-semis est donc très efficace sur les bromes. Les vulpins et ray-grass ont des dormances plus prononcées et donc seulement une partie du stock semencier d’adventices aura la capacité de germer sur la période fin été/début automne. La réussite des faux-semis sera donc plus aléatoire.

Pour détruire les levées ultérieures à un faux-semis, il est possible de le faire mécaniquement, mais l’intervention doit être réalisée idéalement en conditions sèches pour éviter une nouvelle levée.

L’autre alternative consiste à combiner un désherbage chimique type glyphosate à un semis direct avec des éléments de semis de préférence à disques qui viendront perturber le moins possible le lit de semences.

Tableau 2 : Efficacité de différents leviers agronomiques pour limiter la pression adventice sur les parcelles
Efficacité de différents leviers agronomiques pour limiter la pression adventice sur les parcelles

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