Articles et actus techniques
Bretagne

Céréales : adapter la stratégie de régulation à chaque parcelle

En céréales à paille, le risque de verse varie selon la sensibilité de la variété semée, les pratiques culturales (dates de semis, apports d’azote…) et le climat. Au vu de l’hétérogénéité des situations cette année, il est plus qu’incontournable d’estimer ce risque, pour piloter au mieux les applications de régulateurs.

Parcelles de céréales à paille versée

Globalement, cette année, on retrouve une majorité de semis tardifs (entre le 20 novembre et le 5 décembre), avec des apports d’azote potentiellement retardés par les conditions de portance. L’hydromorphie y a réduit le développement végétatif : ainsi, le risque de verse est moindre et l’impasse d’un régulateur est possible en blé tendre avec une variété tolérante à la verse. Autre cas de figure, pour ces mêmes semis tardifs, mais dans des parcelles saines soumises à des températures douces tout l’hiver : le développement végétatif est bon en sortie d’hiver. Ainsi, un régulateur peut être nécessaire à l’exception des variétés tolérantes à la verse (note supérieure à 6,5).

Au contraire, sur des semis d’octobre, pour des parcelles ressuyées avec des apports d’azote précoces et importants, et une variété sensible ou très sensible à la verse, l’application d’un régulateur sera nécessaire.

Sensibilité variétale : le principal facteur de gestion de la verse

La génétique a fortement évolué depuis vingt ans sur la résistance des variétés à la verse. Il est de plus en plus rare d’observer de la verse physiologique en fin de cycle. Le levier génétique permet de faire des impasses de régulateur.

En blé, les variétés tolérantes avec une note CTPS supérieure ou égale à 6,5 n’ont pas besoin de régulateur. Le risque est faible pour celles avec une note de 5,5 ou 6.

Une grille de risque verse pour décider ou non d’intervenir au cas par cas

Au-delà du facteur génétique, le climat de l’automne-hiver 2024, ainsi que les pratiques culturales influencent l’état de biomasse et tallage à épi 1 cm. De trop fortes biomasses et talles augmentent le risque de verse.

La difficulté de cette année est l’antagonisme entre un climat hivernal excédentaire en températures qui favorisent un tallage important et des conditions d’excès d’eau dans les parcelles peu filtrantes qui ralentissent le métabolisme de la plante (moins de talles).

Le principe, pour s’y retrouver est d’utiliser l’une des grilles ARVALIS (blé ou orge) en identifiant tout d’abord la sensibilité variétale. Ensuite, selon l’état de tallage-biomasse de la parcelle, le risque sera à adapter.

Par exemple en blé 

Pour une variété tolérante KWS Extase (note CTPS de 7) : pas de question à se poser, la tolérance variétale permet de se passer de régulateurs.

Pour une variété moyennement sensible type Chevignon (note CTPS 6) : le risque sera faible à moyen, moyen ou élevé selon l’état de biomasse et tallage de la parcelle :
- Risque faible à moyen : pas de régulateur, pour des semis tardifs sans de gros apports à tallage et/ou des signes d’hydromorphie par exemple.
- Risque élevé : régulateur conseillé, pour des semis précoces avant le 20 octobre, avec de gros apports à tallage sur parcelle filtrante par exemple.

Figure 1 : Grille de risque de verse en blé tendre (version ouest)

Figure 2 : Grille de risque de verse en orge d’hiver (version ouest)

Un défaut de rayonnement pour les semis précoces

La météo entre le stade épi 1 cm et 2 nœuds est déterminante dans la réduction (ensoleillé et sec) ou l’augmentation (faible rayonnement, pluies) du risque de verse. Pour les semis tardifs, le stade épi 1 cm ne devrait pas tarder : il faudra être vigilant sur l’état d’ensoleillement sur le début de montaison.

Pour les parcelles les plus précoces, déjà à épi 1 cm depuis quelques jours/semaines, le cumul de rayonnement est en-dessous de la moyenne sur la majorité du territoire, comme le montre la carte 1 sur la période 3 mars-18 mars 2024.

  • L’est de la Bretagne, avec plus de semis précoces, a un cumul de rayonnement légèrement en dessous de la médiane (0 à -5 %).
  • Tandis que l’ouest à un net déficit de rayonnement (-12 à 18 %). Néanmoins, c’est aussi un secteur où les semis sont plus tardifs avec des parcelles qui seront à épi 1 cm -1 nœud fin mars-début avril (le rayonnement de début mars n’est pas à prendre en compte dans ces cas-là).

Carte 1 : Sommes de rayonnement entre le 3 mars et le 18 mars 2024 en % de la médiane 2000-2022

    Carte 1 : Sommes de rayonnement entre le 3 mars et le 18 mars 2024 en % de la médiane 2000-2022

    Réguler en mauvaises conditions : un risque de perte de rendement

    Si nécessaire, un seul traitement, réalisé en bonnes conditions, est suffisant. Les différences d’efficacité entre produits sont faibles dès lors que l’application est réalisée dans de bonnes conditions et à la dose conseillée. Le choix du produit dépend surtout du stade d’intervention.

    Les risques de phytotoxicité sont souvent sous-estimés, et il y a plus à perdre qu’à gagner si les conditions d’application ne sont pas réunies.

    Pour accroître l’efficacité et limiter la phytotoxicité, les applications sont à réaliser :

    • Sur des cultures en bon état (indemnes de viroses, alimentées correctement en eau et azote).
    • Dans des conditions climatiques favorables : temps poussant, lumineux et sans forte amplitude thermique, en tenant compte de la météo le jour de l’application mais aussi durant les trois à cinq jours suivants (tableau 1).
      - Reporter l’intervention si des températures froides (< 5°C) sont prévues dans les cinq jours.
      - Reporter l’intervention si des amplitudes thermiques de plus de 15°C, accompagnées de températures minimum froides prévues dans les cinq jours.
      - Reporter l’intervention en période de sécheresse.

    Tableau 1 : Conditions requises pour la bonne sélectivité et l’efficacité de différents régulateurs

      Tableau 1 : Conditions requises pour la bonne sélectivité et l’efficacité de différents régulateurs
      En résumé

      Blé tendre : sensibilité variétale et pratiques culturales 

      Des variétés tolérantes avec une note CTPS >= 6,5 (KWS extase, Célébrity, Junior, Intensity…) ne nécessitent pas de régulateur.
      Pour des variétés moyennement sensibles (Chevignon, KWS Sphere, LG Absalon…), prendre en compte l’état de biomasse au stade épi 1 cm pour réguler ou non.
      • Les semis tardifs, les parcelles engorgées en eau ou des apports tallage faible à nulle que l’on retrouve fréquemment cette année participent à réduire le risque de verse.

      Climat :
      Pour les parcelles les plus précoces, les faibles rayonnements de mars augmentent le risque de verse.
      Pour les semis tardifs pas encore à épi 1 cm, il faudra surveiller les conditions d’ensoleillement entre épi 1 cm et 2 nœuds.

      Conditions d’intervention 
       En cas d’intervention de régulateur : vigilance sur les conditions d’intervention. Intervenir en mauvaises conditions peut pénaliser le rendement.

      Pour en savoir plus, retrouvez nos préconisations vis-à-vis du risque de verse dans :

      Réagissez !

      Merci de vous connecter pour commenter cet article.

      Se connecter
      Ou connectez-vous avec
      Pas encore inscrit ?
      Créer un compte
      Mot de passe oublié

      Un email vous sera envoyé pour réinitialiser votre mot de passe.